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Jérémie

Enfance et rue : no future ? 900 414 L'Ilot

Enfance et rue : no future ?

Illustration Prisca Jourdain

Mes jeunes années ont été heureuses sur bien des points et elles ont fortement contribué à faire de moi une adulte épanouie et solide. Celles de mon fils et mes deux filles ont suivi et suivent encore le même chemin : scolarité ininterrompue, nourriture équilibrée, fêtes d’anniversaire avec les copains et copines, chambre à soi, entraînement de basket et cours de musique… La norme ? Pas pour tout le monde : beaucoup trop d’enfants, privés de ces besoins fondamentaux, vivent, avec leurs parents, parfois un seul, parfois aucun, en marge d’une société – la nôtre – sans que nous ayons la capacité de répondre à leurs besoins fondamentaux.

Subir l’exclusion alors qu’on n’est encore qu’un nourrisson ? Hors de question ! Et pourtant, cette situation révoltante s’aggrave : on observe une augmentation plus qu’inquiétante du nombre de familles en situation de sans-abrisme. Les derniers dénombrements estiment que 20 % des personnes sans abri sont des enfants ! Et le phénomène, loin de diminuer, s’accélère de manière dramatique. 

De plus en plus de familles sans abri ou en risque de sans-abrisme – souvent portées à bout de bras par des mamans solo – font appel à nos services pour s’en sortir. Mais le manque criant de solutions pérennes que notre secteur peut leur apporter creuse toujours un peu plus le fossé qui les sépare d’un futur digne, dans un chez-soi bien chauffé, avec un frigo suffisamment rempli, sans la menace d’un huissier ni la peur d’une expulsion … 

Mettre en place des réponses adéquates et coordonnées pour les parents, c’est sortir leurs enfants de la boucle du déterminisme social, éviter que la précarité ne se transmette de génération en génération. Car une famille qui n’a pas de logement aujourd’hui risque de mettre des années à sortir de la précarité et tout ce qu’elle entraîne : non accès à une alimentation saine, détérioration de la santé physique et mentale, risque accru de violences conjugales et/ou intrafamiliales, non accès à la culture et aux loisirs, etc. Vivre sans toit, sans droits, c’est la condamnation à un travail de reconstruction extrêmement lourd, quand celui-ci est seulement envisageable. Pour les enfants, c’est aussi le risque d’un parcours scolaire perturbé ou brutalement interrompu, le renoncement aux loisirs, la perte de confiance en soi… L’insouciance et la légèreté font place à la peur et au sentiment d’insécurité. Ces enfants grandissent trop vite et portent dans leur sac à dos des problèmes qui ne devraient pas les concerner.

Je suis persuadée que les solutions durables pour toutes celles et ceux qui sont confrontés au sans-abrisme et au mal logement devront être pensées ensemble. Le décloisonnement sectoriel mais aussi un travail coordonné entre les responsables politiques et les associations de terrain sont plus que nécessaires pour que les droits des femmes, des jeunes ou des enfants soient, un jour, pris en compte et rencontrés dans une dynamique globale. Les lignes budgétaires comme elles sont pensées à l’heure actuelle ne permettent que trop rarement d’avancer dans cette logique d’intersectorialité.

Sans ce travail coordonné, sans moyens financiers conséquents, toujours trop d’enfants continueront à subir la pauvreté et l’exclusion au quotidien, seront privés dans les années à venir de leur droit fondamental au bonheur et à l’insouciance. 

Il en va de notre responsabilité à tous et toutes. Leur avenir est entre nos mains.

Ariane Dierickx, directrice de L’Ilot  

8 mars : la pauvreté est bel et bien genrée 1024 420 L'Ilot

8 mars : la pauvreté est bel et bien genrée

Pauvreté individuelle, dépendance financière, taux d’emploi, écarts salariaux... En matière de précarité socio-économique en Belgique, les femmes occupent toutes les premières places.

La Journée internationale de lutte pour les droits des femmes du 8 mars, c’est l’occasion pour L’Ilot de rappeler que c’est notamment la pauvreté résultant d’emplois mal considérés et précaires qui oblige les personnes – et donc majoritairement les femmes – à vivre constamment à la limite de leurs capacités, mal logées, avec le risque permanent de basculer…

Pas d’argent ? Pas de logement !

L’affirmation semble évidente. Ce qui l’est moins, c’est l’impact de la précarité financière sur le public féminin en particulier. Beaucoup d’indicateurs, notamment ceux que L’Ilot a mis en évidence dans son étude-action « Sans-abrisme au féminin : sortir de l’invisibilité », montrent clairement que les femmes sont, de manière générale, plus pauvres que les hommes :

  • 70 % des personnes en situation de pauvreté individuelle sont de sexe féminin ;
  • en Wallonie, 27,1 % des femmes sont dans une situation de dépendance financière (à un conjoint la majorité du temps) contre 12,3 % des hommes ;
  • les familles monoparentales vivent avec un risque de pauvreté de 41 %. Or, dans 83 % des cas, ces ménages sont en réalité composés d’une femme seule avec un ou plusieurs enfant(s) ;
  • après les familles monoparentales, ce sont les femmes seules de moins de 65 ans qui sont les plus exposées à la pauvreté, avec un risque de 27,6 %.

Cette plus grande précarité des femmes par rapport à leurs homologues masculins fait qu’elles sont notamment plus exposées au mal logement et, dans les situations les plus problématiques, au sans-abrisme. Pour se payer un logement décent, il faut de l’argent ! 

Si la problématique est loin d’être neuve, elle nécessite pourtant, encore et toujours, le développement de solutions structurelles et innovantes, focalisées sur le vécu et la situation particulière des femmes. L’Ilot tient à travailler dans ce sens dans le futur en mettant notamment l’accent sur l’importance de former les travailleurs et travailleuses de terrain aux spécificités liées au genre de la personne sans abri ou mal logée.

Des emplois pénibles, précaires et mal payés

Pour éviter de tomber dans la précarité, il faut entre autres avoir accès à un travail de qualité, bien rémunéré. Et les statistiques montrent encore une fois qu’hommes et femmes ne sont pas égaux face à l’emploi.

La crise sanitaire liée au Coronavirus a en effet révélé à quel point les métiers dits « essentiels », de soins aux autres et à la société, sont principalement exercés par des femmes, dans des conditions de travail aussi pénibles que précaires et avec des salaires très (trop) bas : infirmières, aide-soignantes, caissières, puéricultrices, techniciennes de surface, etc. Plusieurs études ont aussi démontré que la charge du travail domestique et des soins aux enfants a explosé pour les femmes durant les confinements successifs, notamment en raison du télétravail. Les violences conjugales et intrafamiliales ont aussi augmenté, comme a pu le constater notre secteur, manquant de places pour les victimes.

Quelques chiffres – parmi tant d’autres exemples d’inégalités :

· selon les secteurs, 80 à 98% des « héros de la crise » - soit les travailleurs et travailleuses de première ligne – étaient en réalité des héroïnes. Or, la grande majorité d’entre elles gagnent moins que le salaire belge moyen ;

· 81% des travailleurs dans le secteur de la santé humaine et de l’action sociale sont des femmes ;

· l'écart salarial annuel s’élève à 21%, et les pensionnées bénéficient d’une pension 30% inférieure à celles des retraités. Ces écarts sont principalement dus au travail à temps partiel et à la forte présence des femmes dans des secteurs dévalorisés et mal rémunérés, typiquement le secteur du social et du soin ;

· en Wallonie, 68% des travailleuses de l’économie sociale sont à temps partiel (pour 31% des hommes). C’est le cas de 53% des Bruxelloises (et 23% des Bruxellois) ;

· selon une étude de la VUB, les femmes effectuent plus de deux tiers des tâches ménagères. L'institut pour l’Egalité entre les Femmes et les Hommes rappelle qu’un jour de semaine, les hommes consacrent 1h30 de plus que les femmes au travail rémunéré, tandis que les femmes utilisent ce temps supplémentaire pour le soin aux enfants et les tâches domestiques. Les hommes ont aussi 45 minutes de plus de temps libre chaque jour. Ces différences s’accroissent encore le week-end.

Une enquête française a montré que le travail domestique des mères a doublé pendant la crise sanitaire. La crise sanitaire pourrait donc faire reculer de 20 ans les très lentes évolutions en termes de répartition des tâches.

Qui prend soin de celles qui prennent soin ?

Pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, L’Ilot a décidé de se positionner et de participer à la journée de lutte du 8 mars. Le GRIF(F !), soit le Groupe de Réflexion et d’Initiative Féministes (et Féroces !) de L’Ilot a invité toutes les travailleuses à une journée de partage, de réflexion et de lutte, centrée autour de la problématique du soin des travailleuses du care. Les coordinations et directions de nos différents services de terrain ont tout mis en œuvre pour donner la possibilité aux travailleuses qui le souhaitent d’y participer.

L’initiative sera répétée, chaque année, tant que les femmes de tous les horizons ne seront pas considérées comme égales des hommes, dans le monde du travail et partout ailleurs.

Rights First : reconsidérer l’accompagnement et l’accès aux droits sociaux pour les personnes les plus vulnérables 900 414 L'Ilot

Rights First : reconsidérer l’accompagnement et l’accès aux droits sociaux pour les personnes les plus vulnérables

Le projet Rights First offre l'opportunité de reconsidérer les processus actuels d'accompagnement des personnes vulnérables ainsi que les politiques visant à faciliter leur accès aux droits sociaux. L'innovation étant le maître-mot du projet, il propose de nouveaux partenariats et des façons inédites de faciliter les politiques d'intégration. Il s’articule autour de 3 axes de travail : l'accès au revenu minimum, au logement et aux solutions d'emploi. Le projet fera l’objet d’une évaluation sur une période de 30 mois (du 1er janvier 2022 au 30 juin 2024).

Le projet Rights First est coordonné par Bruss’help. Il réunit plusieurs acteurs de terrain (DIOGENES, Hobo, L’Ilot et le New Samusocial) qui travailleront notamment avec la Fédération des CPAS ou Actiris. Il bénéficie aussi du soutien de Crisis (Royaume-Unis) et de St Joan de Déu Serveis Socials (Espagne) qui partageront leur expérience dans la mise en œuvre d’une approche holistique. 

Le projet Rights First s'inscrit dans le cadre du programme européen pour l'emploi et l'innovation sociale « EaSI » 2014-2021, financé directement par la Commission européenne. La Commission Communautaire Commune du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale y apporte également une contribution financière. 

Contexte 

Le projet Rights First s'inscrit dans le cadre du programme européen pour l'emploi et l'innovation sociale « EaSI » 2014-2021, financé directement par la Commission européenne. Ce programme vise à mettre en œuvre sa stratégie 2020 pour promouvoir un niveau élevé d'emplois durables et de qualité, une protection sociale adéquate et décente en vue de lutter contre l'exclusion sociale et la pauvreté ainsi qu’une amélioration des conditions de travail. Il répond à une volonté générale de mettre fin au sans-abrisme d'ici 2030. 

La Commission européenne a mis en place ce programme en recherchant des innovations sociales (services, produits ou modèles) et des politiques expérimentales pour répondre aux besoins sociaux. Parmi toutes les avancées susceptibles de mettre fin à la pauvreté et à l'exclusion, la Commission Européenne garde en ligne de mire la garantie d'un revenu minimum, d'un logement et d'un emploi pour que les personnes puissent avoir une vie décente et retrouver leur dignité. Il va sans dire que la crise pandémique à laquelle nous sommes confrontés depuis quelques années a mis à mal les progrès accomplis depuis 2014. Bien qu'acquis dans tous les Etats Membres de l'Union européenne, les dispositifs de revenu minimum méritent d'être revus et modernisés. C'est dans ce cadre que s'ancre le projet Rights First.  

La Commission communautaire commune du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale y apporte également une contribution financière. Sur proposition d’Alain Maron, ministre de l'Action sociale et de la Santé, le Collège Réuni de la Commission Communautaire Commune a également accordé un financement au projet Rights First. Ce projet est directement lié aux objectifs de l'accord de gouvernement pour la législature 2019-2024 puisqu'il active la réouverture des droits, améliore l'accès à l'emploi et facilite l'accès au logement durable. Le soutien financier accordé par le Collège Réuni de la Commission Communautaire Commune est également motivé par la dimension innovante du projet réunissant de multiples acteurs.

Tous les deux ans, Bruss'help réalise un dénombrement pour estimer le nombre de personnes à la rue ou vivant dans des logements inadaptés (abris, squats, etc.). En 2020, le nombre estimé s’élève à 5313 personnes. Bien que les causes du sans-abrisme soient multiples, il se traduit souvent par une perte de droits sociaux – certaines personnes n'ont même jamais eu accès à de tels droits – pouvant entraîner une disparition administrative. 

Ce phénomène est récurrent pour les personnes officiellement présentes sur le territoire bruxellois à un moment donné qui finissent par être radiées du registre national en raison de l'absence d'une adresse de résidence ou de référence. Pour briser ce cercle vicieux, un soutien administratif ainsi qu'une aide à la recherche d'un logement et d'un emploi sont indispensables.

Le projet Rights First

Le projet Rights First ambitionne de toucher plusieurs publics. Il examine notamment la possibilité de rouvrir les droits sociaux des personnes sans abri en situation administrative irrégulière à Bruxelles pour leur permettre de s’émanciper dans leur propre projet de vie en Belgique. Il est également ouvert, par exemple, à des personnes avec revenus recherchant des conditions de logement décentes. 

Les trois axes de travail du projet Rights First sont en effet l'accès au revenu minimum, au logement et aux solutions d'emploi. C'est une occasion unique de reconsidérer le processus actuel d'accompagnement des personnes vulnérables ainsi que les politiques visant à faciliter l'accès aux droits sociaux. Ce qui est régulièrement mis en cause, c'est la lenteur des services à tous les niveaux et la complexité des démarches à entreprendre pour retrouver une situation de vie décente. 

L'innovation étant le maître mot de ce projet, il propose de nouveaux partenariats et de nouvelles façons de faciliter les politiques d'intégration dans le cadre d'une évaluation post ante et ex post sur une durée de 30 mois (du 1er janvier 2022 au 30 juin 2024). 

À l’issue de ce projet, est visée une simplification administrative pour percevoir rapidement un revenu, trouver un logement ou un nouvel emploi. Cette simplification administrative pourrait, à long terme, être étendue à un public plus élargi.

Partenaires

Chargé de sa coordination, Bruss’help assure le bon déroulement du projet Rights First. 

En tant qu'autorités publiques, les centres publics d’action sociale (CPAS) jouent un rôle crucial pour faciliter l'accès aux droits sociaux dont le revenu minimum. Comme ils sont 19 dans la seule région de Bruxelles, la Fédération des Centres publics d'action sociale contribuera au débat sur l'amélioration des politiques. Toutefois, quatre CPAS (ceux des communes de Forest, Bruxelles-ville, Auderghem et Saint-Gilles) participeront au projet de manière opérationnelle ainsi qu’au processus d'évaluation. Une autre autorité publique associée au projet est Actiris dont l'expertise en matière d'accompagnement auprès des demandeur∙euse∙s d'emploi pourrait être étendue aux personnes sans abri. 

D'autres prestataires de services offrant un accompagnement direct aux personnes vulnérables apporteront une valeur ajoutée au projet en partageant leur propre expertise :

  • DIOGENES, qui est spécialisé dans le travail de rue ; 
  • Hobo, qui gère un centre de jour et propose un accompagnement vers la remise à l’emploi ;
  • L’Ilot, qui propose des solutions de logements durables et abordables pour le public bruxellois sans abri et un service d'accompagnement à domicile après l’entrée en logement (S.Ac.A.Do) ; 
  • le New Samusocial, qui gère différents types d'hébergements (d’urgence, de transition et un dispositif Housing First). 

Des partenariats ont également été établis avec Crisis, une organisation caritative britannique, et St Joan de Déu Serveis Socials, un service social basé à Barcelone. Ces deux organisations ont développé une approche holistique de la lutte contre le sans-abrisme et encadreront les partenaires belges. Leur expertise sera certainement un enrichissement tout au long du projet.

Comment ? L'approche holistique

L'objectif du projet est d'accompagner les personnes sans abri à Bruxelles par une approche holistique et en se concentrant particulièrement sur : 

  • l'inscription administrative pour réactiver les droits sociaux (adresse résidentielle ou adresse de référence et revenu minimum d’intégration sociale) ;
  • l'accompagnement dans la recherche d'un logement et le maintien dans ce logement ; 
  • l'intégration sur le marché du travail. 

Pour analyser les parcours d'intégration, nous nous pencherons sur les conditions de départ des bénéficiaires. Deux scénarios peuvent, par exemple, être envisagés : 

  • le premier est celui d'un∙e bénéficiaire sans abri, dormant dans la rue ou utilisant un hébergement d'urgence ou de transition et qui n'est ni enregistré∙e auprès de la municipalité (donc pas de contact avec un CPAS) ni n'a accès à l'aide sociale, aux services de logement ou d'emploi. Dans ce cas, le parcours commencera probablement par la réouverture des droits ou par la recherche d'un hébergement de transition ;
  • dans le second scénario, le ou la bénéficiaire est sans abri, peut vivre dans un refuge ou dans un hébergement de transition et a déjà accès au revenu minimum grâce à l'aide d'un CPAS. Ce parcours d'intégration propose de faciliter l'accès au marché du travail par le biais d'un accompagnement, d'une formation et d'une recherche d'emploi, couplé à un soutien pour trouver un logement stable. 

Chaque scénario prévoit des exceptions car les parcours d'intégration ne sont pas figés. C'est pourquoi une approche holistique fondée sur un nouveau partenariat fera la différence pour une personne sans abri.

Pour renforcer la solidité de l'approche, le projet s'inspire du travail de nos partenaires européens : les projets Crisis et Sant Joan de Deu. Le soutien par les pairs et des formations seront organisés sur la base de la méthodologie d'intervision afin de partager les pratiques et les connaissances entre les projets en mettant en lumière des situations complexes et de résultats insatisfaisants. 

Cela signifie d'établir et de renforcer la coopération entre les partenaires impliqués. Un tel partenariat a le potentiel de couvrir l'ensemble du parcours analysé qui va de la rue ou d'un hébergement à court terme vers un logement permanent et un emploi. Cette approche holistique de la prestation de services facilitera l'obtention du droit à un revenu minimum adéquat et à d'autres prestations en espèces pour les personnes sans abri qui n'ont actuellement aucun recours aux fonds publics.

Suivi et évaluation 

Le suivi et l'évaluation sont des éléments centraux de ce projet et seront réalisés par un∙e expert∙e externe. Le processus de suivi et d'évaluation permettra de justifier le projet lui-même, ses progrès vers ses objectifs, ses faiblesses et ses réalisations, et la manière dont il devra évoluer pour répondre aux besoins des bénéficiaires. Sur la base d'une approche ex-ante/ex-post, les partenaires seront en mesure d'assurer la durabilité de l’impact. Par conséquent, l'évaluation couvrira les nouveaux partenariats, l'efficacité et l'efficience de l'accès aux droits sociaux ainsi que la satisfaction des bénéficiaires impliqués.

Innovation

Le sans-abrisme est une thématique importante et prioritaire pour l'innovation sociale. Les prestataires de services du secteur de l’aide aux personnes sans abri peuvent être des acteur∙trice∙s clés de l'innovation sociale et le secteur a besoin de soutien pour développer, tester et étendre les innovations afin de lutter contre le sans-abrisme et ainsi contribuer aux progrès dans les objectifs des piliers des droits sociaux de la stratégie européenne 2020. 

Chaque axe composant ce projet pris isolément présente déjà de multiples contraintes de temps et de ressources. Le projet Rights First apporte une réponse plus complète et renforce le dialogue entre les prestataires de services aux personnes sans abri. L'approche holistique englobant les droits au revenu minimum, au logement et à l'emploi est nouvelle pour le secteur bruxellois et a le potentiel de s'étendre à d'autres domaines thématiques de lutte contre l'exclusion liée au logement tels que la santé et l'éducation. 

De plus, les partenariats sont innovants car ils réunissent les prestataires de services aux personnes sans abri et les autorités publiques tout en combinant une variété de professions qui ne sont normalement pas en contact lorsqu'il s'agit de traiter des situations d'exclusion de personnes. 

Rights First plaide pour un travail transversal : les professionnel∙le∙s travaillant avec les personnes sans abri peuvent innover en portant leurs services au-delà de leur cadre traditionnel afin d'améliorer l'accessibilité et l'engagement.

Dans l’ensemble, il y a beaucoup de possibilités pour l'innovation sociale en soutien au développement, l'essai et la diffusion de l'approche holistique de la prestation de services que Rights First met en œuvre. 

Le contenu de cette publication relève de la seule responsabilité de L'Ilot et ne reflète pas nécessairement les positions de la Commission Européenne.
Tempête Eunice : inégalités en rafales 890 499 L'Ilot

Tempête Eunice : inégalités en rafales

La tempête Eunice, qui balaye actuellement la Belgique, s’annonce comme l’une des pires de ces 30 dernières années. Alors que les autorités publiques encouragent la population à se calfeutrer, de nombreuses personnes seront, dans les prochaines heures, en danger faute d’abri sécurisé, vont devoir affronter les éléments au péril de leur vie.

L’Ilot tient à rappeler que, encore une fois, ce sont celles et ceux qui vivent dans les conditions les plus précaires qui se retrouvent en première ligne quand la situation dégénère : pas moyen de s’abriter quand on n’a nulle part où loger ! 

Sans solutions pérennes et durables pour assurer la sécurité et un futur digne à celles et ceux qui vivent en rue, sans une politique innovante en matière de rénovation des habitations qui le nécessitent, sans garantie d’accès à des logements dignes pour les publics les plus précarisés, chaque bourrasque trop importante entraînera invariablement des drames humains dans son sillage.

Il est primordial de, sans tarder, dégager des moyens pour assurer la sécurité de tous face aux catastrophes météorologiques. Si nous restons sans réaction, le vent sèmera, après la tempête, la désolation pour toutes celles et ceux qui vivent en rue ou sous des toits branlants.

Énergie : la réaction de L’Ilot face à la hausse des prix 1024 682 L'Ilot

Énergie : la réaction de L’Ilot face à la hausse des prix

Ployer sous les coups de l'énergie

L'explosion des coûts énergétiques nous oblige toutes et tous à resserrer nos budgets et à moins consommer. Pas toujours agréable, mais jouable. Ce qui l’est beaucoup moins, c’est continuer à vivre dignement quand on survit financièrement. Ce qui ne l’est pas du tout, c’est devoir choisir entre manger et se chauffer. Pour L’Ilot : les deux, sans hésiter !

Comment faire face à une facture qui triple quand dépenser le tiers est déjà difficile, voire impossible sans le soutien des services agréés ? Comment garder un chez-soi quand on ne peut plus se le payer ? Aider les personnes à répondre à ces questions, c’est la réalité quotidienne du Service d’accompagnement à domicile de L’Ilot (S.Ac.A.Do), qui apporte notamment son soutien aux personnes mal logées en risque de sans-abrisme. La crise énergétique que nous vivons, c’est une quasi-condamnation à la rue pour beaucoup de personnes et de ménages sans aucune sécurité financière. Et elle va surement, dans les prochains mois, encore frapper plus fort.

Sans plus attendre, L’Ilot fait siennes les recommandations déjà édictées par ses partenaires – notamment le Centre d’Appui SocialEnergie de la Fédération des Services Sociaux – et plaide pour qu’elles débouchent rapidement sur des actions concrètes :

  • la pérennisation du tarif social et son élargissement sur la base des revenus, notamment pour les personnes bénéficiant d’une intervention majorée ou en situation de médiation de dettes ;
  • l’introduction de prix réglementés pour les consommations domestiques ;
  • la mise à contribution du secteur et des changements dans le design du marché de l’électricité ;
  • une politique ambitieuse d’isolation du bâti qui permette de toucher tous les ménages, qu’ils soient propriétaires ou locataires.

Si l’urgence sociale est bien réelle, elle ne peut cependant pas entraîner de décisions prises à la va-vite : consulter les associations et organismes – publics comme privés – dédiés à l’aide aux personnes est une obligation pour que les solutions dégagées soient concertées, coordonnées et durables.

Payer sa facture de gaz devient un luxe ! Pour soutenir celles et ceux qui risquent de se retrouver à la rue si les prix continuent à augmenter, faites un don à S.Ac.A.Do, le service de L'Ilot qui travaille avec les personnes mal logées ou en risque de sans-abrisme. Celles qui ont de moins en moins. Celles qui n'en peuvent plus des coups.

Sans-abrisme au féminin : sortir de l’invisibilité – Elodie et Cindy 1024 420 L'Ilot

Sans-abrisme au féminin : sortir de l’invisibilité – Elodie et Cindy

Recherche-action sur les violences faites aux femmes les plus précaires (sans abri) et préfiguration d'un centre de jour pour femmes.

Ce 13 janvier, L’Ilot présente aux parlementaires bruxellois∙es l’étude-action sur les femmes en situation de sans-abrisme qu’elle mène depuis mars 2021. Et ses constats sont sans appel : le nombre de femmes sans-abri ou mal logées est largement sous-évalué et l’offre de services ne leur est pas adaptée alors qu’elles subissent plus de violences – notamment liées au genre – que leurs homologues masculins. Dans une démarche intersectorielle et avec l’aide d’un groupe d’expertes du vécu, L’Ilot a développé une série de recommandations pour proposer des solutions dignes et durables à ces constatations, notamment la création d’un centre de jour par et pour les femmes.

Elodie Blogie, qui a mené l'étude-action sur les femmes sans abris pour L’Ilot, dresse l’amer portrait d’une société – la nôtre – qui n’a jamais pris en compte les réalités du sans-abrisme au féminin.

Outre la création d’un centre de jour #paretpourlesfemmes, L’Ilot recommande notamment :

  • D’améliorer la méthodologie de dénombrement des femmes sans abris et de mener une étude qualitative à leur sujet
  • De créer des formations spécifiques sur le genre, le sexisme ou encore la non-binarité pour les travailleur∙euse∙s sociaux∙ales
  • De rapprocher les secteurs sans-abri et droits des femmes
  • De lutter contre la précarité menstruelle
  • (re)Penser la sexualité et l’intimité des personnes sans abris, notamment en hébergement

Cindy est l’une des expertes du vécu ayant co-construit avec L’Ilot les ébauches d'un futur centre de jour par et pour les femmes en situation de sans-abrisme. Elle nous explique le « pourquoi ? » de son implication et insiste sur l’absolue nécessité d’un tel projet.

Dans la presse : 

Sans-abrisme au féminin : sortir de l’invisibilité – Rapport 1024 420 L'Ilot

Sans-abrisme au féminin : sortir de l’invisibilité – Rapport

Etude-action sur les violences faites aux femmes les plus précaires (sans abri) et préfiguration d'un centre de jour pour femmes.

Ce 13 janvier, L’Ilot présente aux parlementaires bruxellois∙es l’étude-action sur les femmes en situation de sans-abrisme qu’elle mène depuis mars 2021. Et ses constats sont sans appel : le nombre de femmes sans abri ou mal logées est largement sous-évalué et l’offre de services ne leur est pas adaptée alors qu’elles subissent plus de violences – notamment liées au genre – que leurs homologues masculins. Dans une démarche intersectorielle et avec l’aide d’un groupe d’expertes du vécu, L’Ilot a développé une série de recommandations pour proposer des solutions dignes et durables à ces constatations, notamment la création d’un centre de jour par et pour les femmes.

Dans la presse : 

La Kart #2 accompagner les jeunes en errance : le projet MACADAM 1024 875 L'Ilot

La Kart #2 accompagner les jeunes en errance : le projet MACADAM

Madeleine Guyot, présidente de l’association Macadam - jeunes en errance et Simon Niset, directeur d’une des maisons d’accueil pour hommes seuls de L’Ilot à Charleroi échangent sur les spécificités de l’accompagnement des jeunes (entre 15 et 26 ans).

L’Ilot : Simon Niset, est-ce que vous
accueillez des jeunes dans votre
maison d’accueil ?

Simon Niset : Oui, en 2019 et en
2020 on a accueilli 20 % de jeunes
ayant entre 18 et 24 ans. C’est très
significatif. C’est une évolution récente.

L’Ilot : Comment ces jeunes hommes
sont arrivés chez vous ?

Simon Niset : Il y a différentes
manières : soit ces jeunes connaissent
des maisons d’accueil, soit ils se sont
adressés à un service social de première
ligne, soit ils appellent d’eux-mêmes
partout en espérant trouver une
place d’accueil et d’hébergement
temporaire… Ce qui m’interpelle c’est
que beaucoup de ces jeunes ont déjà
un parcours dans l’aide à la jeunesse.
On peut donc se poser la question d’un
certain échec à un moment précoce, au
niveau familial d’abord et ensuite au
niveau des institutions qui sont censées
prendre le relais. Les questions de mise
en autonomie ont toujours été très
compliquées. Force est de constater que
pour une bonne partie de jeunes, cela
ne fonctionne pas comme cela devrait.
Avec l’équipe socio-éducative de notre
maison d’accueil à L’Ilot, nous nous
interrogeons par rapport à l’accueil de
ce public, et, entre autres, de savoir si
une maison ouverte à tous les âges est
vraiment bien adaptée. On constate
deux choses : la première, c’est que
certains sous-groupes de jeunes vont
rentrer en conflit avec des plus âgés ; la
deuxième c’est la potentielle mauvaise
influence de plus âgés sur les plus
jeunes, notamment pour ceux qui
cherchent une figure parentale. En
même temps, je crois fort à la mixité
des publics, la mixité des âges… D’une
part, créer des structures spécifiques
pour les jeunes peut accroître le risque

pour eux de se tirer mutuellement vers
le bas. Mais, d’autre part, il faut le dire
honnêtement, on a déjà accueilli des
jeunes qui sont ressortis plus abîmés
d’une maison d’accueil qu’à leur arrivée
parce qu’ils y avaient rencontré les
mauvaises personnes, souvent en lien
avec des problèmes d’assuétudes et de
consommation…

L’Ilot : Le risque de glissement vers
le bas serait selon vous moins grand
si les jeunes restaient en groupe sans
autre contact avec des plus âgé·e·s ?

Simon Niset : En fait, je ne dirais pas
que c’est une problématique liée au
fait que les jeunes se regroupent. Il est
évidemment normal que les jeunes
s’associent. Ce qui est compliqué pour
nous, c’est de leur faire comprendre
que les enjeux ne sont pas les mêmes
pour eux que pour des jeunes qui
sont en famille, et n’ont pas eu ce
parcours d’errance et d’exclusion qui
est le leur. On peut respecter le fait
qu’à 18 ans, on fait la fête, on est un
peu insouciant…mais un jeune reste
chez nous pendant neuf mois et, si au
bout des neuf mois, on n’arrive pas à
concrétiser un projet de logement, il va
se retrouver à la rue. Il y a une urgence
à se mobiliser mais c’est parfois assez
difficile de leur en faire prendre
conscience.

Madeleine Guyot : Ce que Simon
dit résonne fort à plein de niveaux.
C’est une question complexe. Ce
public a besoin d’être entendu dans
ses demandes et ses non-demandes,
d’être compris et qu’un lien soit recréé.
Le but de l’initiative Macadam c’est
de proposer un accueil « bas seuil »
de jour inconditionnel pour un
public fortement désaffilié et de lui
fournir une réponse le plus possible
désinstitutionnalisée.

« Bas seuil », cela implique que tout jeune peut y venir, quelle que soit la complexité de
sa situation, quel que soit son niveau
d’autonomie.

L’Ilot : Qu’est-ce que ce ça veut dire
« une réponse désinstitutionnalisée » ?

Madeleine Guyot : C’est permettre
constamment à la structure de se poser
la question de savoir si les services
qu’elle offre sont adaptés aux besoins.
C’est forcer l’institution à s’adapter
aux jeunes plutôt que les jeunes au
fonctionnement de la structure.
C’est aussi éviter une conditionnalité
monolithique. Car pour certains
jeunes, la mise en projet ou le projet
de logement, etc., ça peut fonctionner.
Mais pour plein d’autres jeunes, ça
ne fonctionne plus. Il leur faut un
temps de repos. Madacam veut le leur
offrir, avec un accompagnement. Ça
implique d’être prêt à accueillir la nondemande
des jeunes. Voilà donc nos
trois principes directeurs à Macadam :
l’inconditionnalité, le fait de ne pas
s’institutionnaliser et le fait d’accueillir
la non-demande.

L’Ilot : Est-ce que le fait d’être financé
par les pouvoirs publics, qui ont des
attentes, ne risque pas justement de
conduire à une institutionnalisation ?

Madeleine Guyot : L’ADN de Macadam
c’est l’intersectorialité : santé mentale,
aide à la jeunesse, sans-abrisme, lutte
contre la pauvreté, etc. L’Ilot connait
bien ce type de démarche parce qu’il est
membre du Conseil d’Administration
et fonctionne beaucoup avec d’autres
secteurs. Cela garantit une approche
plus large que celle d’un seul secteur
donc d’une seule « vision politique ».
La volonté de Macadam c’est de ne pas
rentrer dans une case afin de faire place

à quelque chose qui s’articule entre la
minorité et la majorité d’âge, le sansabrisme,
l’aide à la jeunesse, la santé
mentale, la lutte contre la pauvreté, etc.

L’Ilot : Simon Niset, comment
réagissez-vous à l’idée de la création
d’un centre de jour bas seuil pour
jeunes ?

Simon Niset : Je pense que c’est une
initiative qui a énormément de sens.
Il y a vraiment urgence. C’est un
besoin qui avait d’ailleurs déjà été
relayé par Philip De Buck, directeur du
Centre d’Accueil de jour de L’Ilot, qui
disait qu’il était alarmé par le nombre
de jeunes qu’il voyait, leur difficulté
à trouver leur place dans un centre
ouvert à tous et toutes, la difficulté de
l’équipe à répondre à leurs besoins et
attentes spécifiques et la potentielle
mauvaise influence que pouvait avoir le
public plus ancien sur ce public jeune
qu’il identifiait comme extrêmement
fragile.

L’Ilot : Quelle est la bonne manière
d’accueillir et d’accompagner ces
jeunes ?

Simon Niset : Je pense qu’il faut aller
vers un maximum de diversité et éviter
les groupes homogènes, pour que
tous les jeunes se sentent autorisés à
fréquenter ce centre. Après, les jeunes
sont dans la construction de soi, dans
la remise en question d’un système et
de toute forme d’autorité. Il faut donc
qu’il y ait un cadre clair mais avec
lequel les éducateurs et éducatrices
puissent jouer de manière intelligente,
sinon ça risque d’être extrêmement
compliqué.

Madeleine Guyot : Nous accueillons
tous les jeunes, en adaptant les
modalités d’accueil. Ces jeunes ont

l’errance comme seul dénominateur
commun. On parle de personnes
migrantes, LGBTQI+, de jeunes filles
enceintes, etc. Il faut les toucher et les
accompagner de façon pertinente, en
fonction de leur situation, et être très
réactif. Enfin, nous voulons stimuler
leur participation, au sein de Macadam
mais aussi pour se faire entendre des
politiques, intervenir comme experts
du vécu, etc.

L’Ilot : Quels sont les défis et les
points d’attention ?

Simon Niset : Il faut une équipe solide
et nombreuse pour accompagner ces
jeunes aussi très concrètement dans
leurs démarches administratives ou
pour la recherche d’un logement.
Et bien intégrer la structure dans le
quartier, pour que les jeunes y accèdent
facilement, sans craindre de n’être pas
bienvenus.

Madeleine Guyot : Ils sont nombreux.
Il faut éviter d’entrer dans la fameuse
« boucle de mobilité » des jeunes en
errance, qui circulent sans cesse entre
les mêmes services et reviennent à
chaque fois à la « case départ ». L’enjeu,
c’est d’améliorer la trajectoire de ces
jeunes. Cela veut dire promouvoir
l’intersectorialité, qui est indispensable.
On doit également arriver à toucher
des jeunes qui sont plus difficiles à
atteindre, comme les jeunes victimes de
traite et d’exploitation sexuelle. Nous
voulons aussi développer une expertise
sur ces publics qui puisse servir à tous
les acteurs. Enfin, il faut assurer des
financements à la hauteur des enjeux.
Nous avons besoin de l’engagement
ferme et concret des politiques sur cette
question.

La Kart #2 témoignage 1024 515 L'Ilot

La Kart #2 témoignage

Antoine a dix-sept ans.
Il vivait avec sa mère,
son beau-père et les enfants de ce dernier.
L’enfer de la rue, il le connait déjà.

l’appart il était trop petit pour tout le monde
on m’appelait pas pour manger mon beau-père
il me disait de la fermer y avait pas d’assiette pour moi
pas de couverts rien
ils allaient voir papy et mamy on me disait rien
c’était tout pour les petits rien pour moi
ils m’ont trop mis des bâtons dans les roues
je sais pas comment expliquer
moi je voulais juste draguer les filles faire
de la musique la fête avec des copains vous voyez
mon beau-père
mon beau-père c’était pas ça
mes notes ça n’allait pas
je faisais toujours trop de bruit
j’étudiais pas assez je sortais trop
j’allais pas droit j’aurais dû
alors quand il me frappait
ben voilà
voilà

tu dis c’est juste quelques jours madame j’ai quelques problèmes
mais ça va je vais m’en sortir vous en faites pas
mais non ça va pas
j’ai nulle part où aller
quand je suis parti mon beau père gueulait que j’avais pas intérêt à revenir
ma mère pleurait
elle disait rien elle est restée avec lui elle est restée et puis
désolé
j’ai pas tenu longtemps je veux dire l’école dormir chez des potes
et puis quels potes ils étaient pas là
de toute façon leurs parents ils veulent pas que je traîne avec eux
je suis pas comme il faut
on me regarde partout où je vais on se fout de moi
tu vois d’un coup tu comprends que tu peux compter sur personne
alors faut partir là où on te connait pas

quand t’es trop déprimé y a toujours des gens dans le centre
tu vois des gars qui font la fête ils sont bourrés ils comprennent pas vraiment
ce qui se passe ils s’en foutent d’où tu viens
si tu t’en sors bien tu deviens pote ils te paient des bières te passent
une clope ou deux tu te sens moins seul
mais ça dure pas longtemps
tu vas les suivre dans les bars ils te filent des trucs
des machins
tu vois ce que je veux dire
sur le coup tu crois que t’es bien mais non
après c’est pareil y a nulle part où aller
chez ma mère laisse tomber non
non
j’espère pas qu’elle m’attend
peut-être qu’elle le fait c’est possible je sais pas
dormir sur un banc c’est galère sérieux
vas-y tu tires sur ta dernière cigarette
dans le noir et tu entends des bruits autour de toi
qu’est-ce que tu fais
alors tu marches et tu marches toute la nuit
t’attends le soleil c’est sans fin
peut-être qu’il y a une place après dans un centre
quelque part
et là t’as la rage parce que tu te dis merde
si c’est déjà comme ça maintenant
qu’est-ce ça sera à dix-huit ans est-ce que je suis foutu
est-ce que je suis foutu

La Kart #2 chiffres et terminologie 1024 576 L'Ilot

La Kart #2 chiffres et terminologie

25,5 %

20%

4 enfants sur 10

20,6%

933

1 enfant sur 4

de taux de chômage chez les moins
de 24 ans (c’est-à-dire de jeunes
inscrit·e·s comme chercheur·euse·s
d’emploi auprès des organismes
publics de recherche d’emploi tels
que Actiris ou le Forem. Ce chiffre
n’inclut donc pas le chômage invisible
des jeunes non-inscrit·e·s…).

de ces jeunes chômeur·euse·s sont
également inscrit·e·s au CPAS.

naissent, à Bruxelles, dans une
famille qui vit au-dessous du
seuil de pauvreté.

des enfants belges vivaient avant
la crise liée au COVID-19 dans
des foyers « pauvres ». On s’attend
à ce que ce chiffre monte à 25 %
après cette crise.

mineur·e·s ont été recencé·e·s en
2020 comme étant sans abri, une
augmentation de 50,7 % en deux
ans (recensement de Bruss’Help
en Région de Bruxelles-Capitale).

grandit dans un ménage sans
revenus du travail à Bruxelles.

Incasables

Ce terme vient des secteurs de l’Aide à la
jeunesse, de la santé mentale et du secteur
du handicap pour désigner des jeunes à
la croisée de ces trois secteurs et qui ne
trouvent pas de services adaptés à leurs
besoins. Les jeunes ont mis à l’épreuve,
voire en échec, les accompagnements mis
en place par les institutions. C’est aussi
le titre d’un documentaire réalisé par le
Forum contre les inégalités, que nous vous
recommandons.

130 jeunes dits « incasables » en Fédération Wallonie-Bruxelles.

NEET

Ce sont des jeunes qui ne suivent ni
enseignement ni formation et ne sont
pas à l’emploi (« Not in Employment,
Education or Training »). On peut être
« NEET » sur une durée très courte, sans
risque de tomber dans la précarité, ou
au contraire le devenir durablement et
sortir du système. Cette définition mérite
d’être questionnée car elle repose sur des
négations alors que ces jeunes sont le plus
souvent dynamiques et en action. D’après
l’IWEPS (Institut wallon de l’Évaluation,
de la Prospective et de la Statistique), cela
concernait en 2020 (c’est-à-dire avant la
crise liée à la pandémie) 14,1 % des 18-
24 ans en région bruxelloise, 14,8 % en
Wallonie, 8,8 % en Flandre.

14,1 % de NEET en Région bruxelloise en 2019.

MENA

Mineur·e·s Étranger·ère·s Non
Accompagné·e·s : il s’agit de jeunes
d’origine étrangère, arrivé·e·s en Belgique
sans leurs parents ou représentant·e·s
légaux·ales. Certain·e·s entament la
procédure de demande d’asile, mais
beaucoup ne le font pas car ils ou elles
espèrent continuer leur chemin vers un
autre pays européen. Cela fragilise encore
davantage leur situation. Ces jeunes
fuient souvent une grande précarité et
ont, parfois, déjà connu la rue dans leur
pays d’origine. En raison de leur parcours
traumatique de migration et de leur
situation difficile en Belgique, ils ou elles
développent fréquemment des assuétudes.

93 MENA en Fédération Wallonie-Bruxelles au 1er décembre 2019.

Jeunes en errance

Les jeunes en errance sont des jeunes
âgé·e·s de 12-13 ans jusqu’à parfois
25 ans. Ils ou elles ne sont pas
toujours sans domicile au sens strict
mais en mouvement continu entre
amis, hébergement social, famille,
lieux publics, squats, etc. Ces jeunes
vivent des désaffiliations (scolaire,
familiale, institutionnelle). Leur errance
géographique rend leur suivi très difficile,
d’où l’idée de créer un point d’ancrage
grâce au nouveau dispositif d’accueil
Macadam auquel L’Ilot collabore
activement. Ce dispositif d’accueil se veut
inconditionnel et à bas seuil. Pour en
savoir plus, lisez l’entretien sur l’initiative
Macadam avec sa présidente Madeleine
Guyot et Simon Niset, directeur d’une
de nos maisons d’accueil pour hommes à
Charleroi.