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Exclusion du chômage : L’Ilot face à un tsunami social ! 1024 576 L'Ilot

Exclusion du chômage : L’Ilot face à un tsunami social !

©Arnaud Ghys

Exclusion du chômage : L’Ilot face à un tsunami social !

Sommaire :

  • Qui sera exclu du chômage ?
  • Exclusion du chômage : l’explosion du sans-abrisme comme conséquence
  • L’Ilot face au tsunami social : plus de demandes, moins de moyens
    • Votre soutien peut tout changer
  • Sources

En Belgique, les dernières mesures fédérales, parmi lesquelles l’exclusion du chômage, toucheront plus de 180 000 personnes ; et 42 % d’entre elles pourraient perdre toute source de revenu. 

Pour L’Ilot et les personnes sans abri que nous accompagnons, l’heure est grave. La combinaison entre d’une part des coupes budgétaires imposées aux associations venant en aide aux plus fragiles et, de l’autre, des mesures politiques qui vont fortement augmenter la pauvreté, prépare un tsunami social jamais vu.  

Et l’hiver approche, avec pour toutes ces personnes son lot de mauvaises nouvelles : diminution drastique des droits sociaux, exclusions du chômage, précarisation des femmes comme des étudiants et étudiantes, politique de non-accueil, etc. 

Qui sera exclu du chômage ? 

L’exclusion du chômage touchera plus de 180 000 personnes, contactées par vagues à partir du 15 septembre 2025. L’Observatoire de la Santé et du Social de Bruxelles-Capitale (service d’études de Vivalis) s’est penché sur le parcours socioéconomique possible des potentiels exclu∙es et l’impact de la réforme sur les CPAS bruxellois.  

D’après les estimations de l’Observatoire, au cours des 6 mois suivant l’exclusion, et parmi les 24.700 exclu∙es du chômage de moins de 55 ans :

  • 42 % pourraient perdre toute source de revenu ; 
  • 32 % se retrouveraient avec un revenu d’intégration sociale du CPAS ;
  • 21 % bénéficieraient d’un emploi ;
  • et 5 % tomberaient dans l’assurance maladie-invalidité.

Exclusion du chômage : l’explosion du sans-abrisme comme conséquence

Les chiffres affolants de L’Observatoire de la Santé et du Social de Bruxelles-Capitale montrent qu’en Région bruxelloise, le risque est accru de voir l’exclusion du chômage augmenter la précarité d’une part de la population déjà très fragilisée.

Cette mesure du gouvernement Arizona s’accompagne d’autres décisions fédérales qui ne feront qu’augmenter considérablement la pauvreté :

  • diminution drastique des droits sociaux ;
  • précarisation des femmes comme des étudiants et étudiantes ;
  • politique de non-accueil, etc.

C’est un tsunami social qui se prépare. L’impact des réformes sera effroyable pour un nombre très important de personnes : le risque de perte de logement et d’augmentation de la population sans abri n’a jamais été aussi grand.  

Et ce, alors que le nombre de personnes sans chez-soi à Bruxelles a augmenté de 25 % en deux ans, atteignant le chiffre alarmant de 10 000 personnes – 50 000 sur tout le territoire national. Bientôt, ce seront des milliers de personnes supplémentaires qui seront forcées de vivre sans chez-soi.

Un véritable tsunami de précarité, alors que dans le même temps, nous subissons des coupes drastiques de subsides, telles que celle du « Plan Grand Froid » qui envoie ce message terrible : débrouillez-vous ! Sans oublier la diminution de la déduction fiscale sur les dons en Belgique, qui risque de décourager des élans de solidarité pourtant essentiels.

L’Ilot face au tsunami social : plus de demandes, moins de moyens 

Chaque jour, nous devons refuser des demandes dans nos différents centres. La pression augmente et les sollicitations se multiplient. Sarah, 52 ans, mère de quatre enfants, atteinte d’arthrose, nous parlait encore récemment de ses douleurs empirées par chaque nuit passée dehors dans le froid.

Aucune détresse n’est mise de côté et nous accompagnons chaque jour toutes celles et ceux qui franchissent notre porte. Concrètement, nous finançons sur fonds propres un tiers des besoins du centre de jour mixte et la moitié du budget de Circé de L’Ilot, notre centre de jour pour femmes sans chez-soi. Et ces fonds propres, ce sont surtout vos dons qui les composent.

Il est urgent d’agir aujourd’hui. Votre don, quel qu’en soit le montant, est une aide directe et concrète aux personnes qui n’ont plus de chez-soi. En 2024, 2 254 personnes ont franchi les portes de nos centres de jour, comme Sarah et bien d’autres.

Votre soutien peut tout changer 

Chaque don est un acte de résistance contre l’abandon :  

  • Avec 40 €, vous offrez 10 repas à une personne sans abri ;
  • Avec 100 €, vous rendez possible l’accueil complet d’une personne comme Sarah pendant 12 jours dans notre centre de jour ;
  • Avec 300 €, vous offrez 1 mois et demi d’accueil de jour à une personne sans chez-soi.

À L’Ilot, nous choisissons de continuer à ouvrir nos portes, nous refusons de dépendre des autorités publiques qui n’assument plus leurs responsabilités. Nous ne pourrons pas lutter seuls. Nous avons besoin de votre solidarité face à cette crise sociale qui s’annonce. Ce que vous donnez aujourd’hui peut transformer une vie dès demain.

L’exclusion du chômage désigne la fin du droit aux allocations de chômage pour plus de 180 000 personnes en Belgique dès 2026 (ONEM). Cette limitation dans le temps intervient dans le cadre de la réglementation relative à l’assurance chômage, à la suite des mesures du gouvernement Arizona.  

La réforme décidée par le gouvernement fédéral prévoit :

  • la limitation du droit aux allocations de chômage complet à un maximum de 24 mois ;
  • la limitation du droit aux allocations d’insertion à une durée d’1 an maximum ;
  • le changement des conditions d’accès au chômage complet et aux allocations d’insertion à partir du 1er mars 2026 (ONEM).

Entamée le 1er juillet 2025, une période transitoire prévoit la fin du droit aux allocations en plusieurs vagues successives, suivant la situation des demandeur∙ses d’emploi qui percevaient déjà des allocations en juin 2025.

L’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation de la réforme du chômage en Belgique est prévue pour les dossiers avec une date d’admission à partir du 1er mars 2026 (ONEM).

manifestation nationale
Manifestation nationale : L’Ilot présent dans les rues 1024 576 L'Ilot

Manifestation nationale : L’Ilot présent dans les rues

Manifestation nationale : L’Ilot présent dans les rues de Bruxelles

Sommaire :

  • Pourquoi L’Ilot participait-il à la manifestation nationale ?
    • Des décisions du gouvernement fédéral préoccupantes
    • Le désinvestissement du Fédéral face au sans-abrisme
  • Que demandons-nous ?
  • Quelle suite à la manifestation nationale ?
  • Prochaine manifestation nationale : contre les violences faites aux femmes
  • Sources

Le 14 octobre, les équipes de L’Ilot ont participé à la manifestation nationale organisée à Bruxelles pour interpeller le gouvernement fédéral au sujet d’une série de mesures déjà adoptées ou en voie de l’être. Retour sur les raisons de notre mobilisation.

Pourquoi notre association participait-elle à la manifestation nationale ?

L’Ilot, comme l’ensemble des organisations du secteur de l’aide aux personnes sans abri, est profondément inquiète face à l’avenir qui se profile. Notre slogan est « L’Ilot – Sortir du sans-abrisme », mais les politiques actuelles semblent malheureusement nous mener dans la direction inverse. Il était donc essentiel de se mobiliser aux côtés de nos partenaires de terrain à l’occasion de la manifestation nationale.

Des décisions du gouvernement fédéral préoccupantes

Alors que le phénomène du sans-abrisme ne cesse d’augmenter depuis 15 ans en Belgique, le gouvernement fédéral a pris plusieurs décisions qui risquent d’en accélérer encore la progression.

En voici trois particulièrement préoccupantes :

  • Le non-accueil des demandeurs d’asile par la Belgique, pourtant obligatoire du point de vue du droit, amène d’ores et déjà 2 000 personnes supplémentaires à se retrouver sans logement, principalement à Bruxelles. [source]
  • L’exclusion massive du chômage au 1er janvier 2026, qui va saturer les services receveurs. Il est, de plus, estimé que sur les 184 462 personnes concernées, environ 40 % se retrouveront sans revenu aucun [source]. Dans ces conditions, il est difficile d’imaginer qu’une partie d’entre elles ne basculent pas dans le sans-abrisme à court ou moyen terme.
  • Le projet visant à réduire le nombre de malades longue durée [source]. Ces publics particulièrement vulnérables ont de plus grandes chances de tomber dans le sans-abrisme que d’autres catégories de population en cas de perte de revenus.

Le désinvestissement du Fédéral face au sans-abrisme 

Le gouvernement fédéral se désengage clairement de la lutte contre la pauvreté. Résultat : une diminution des moyens pour les organisations — comme la nôtre — qui devront pourtant absorber les conséquences sociales de ces décisions. Voici ci-dessous trois exemples concrets.

  • Avec la diminution de la déduction fiscale pour les dons aux associations, il sera désormais plus difficile de se financer grâce à la générosité privée. Cette mesure représente une perte directe de moyens pour nos organisations. Pour aller plus loin, retrouvez notre carte blanche dans le Vif.
  • La réduction de 45 % du financement de l’aide alimentaire [source] amènera demain davantage de gens à connaître la faim en Belgique. Les Restos du Cœur ont déjà alerté sur leurs grandes difficultés financières.
  • La suppression du Plan Grand Froid, qui représente une perte de 325 000 € pour l’hiver 2025-2026, et trois fois plus pour l’hiver prochain. [source]

Que demandons-nous ?

Nous demandons avant tout que le gouvernement fédéral réinvestisse dans ses missions de lutte contre la grande précarité. Dans ces temps difficiles, l’État doit garantir un financement décent aux derniers filets de sécurité encore en place dans notre société. Il est impensable de faire reposer sur les Régions l’entière charge des conséquences sociales des politiques fédérales.

Nous demandons ensuite une politique plus humaine et plus juste. On ne fait pas progresser une société à coups de sanctions et d’exclusions. Nous avons besoin d’un projet mobilisateur, positif et solidaire, qui prenne réellement en compte les risques de basculement dans la grande précarité.

Quelle suite à la manifestation nationale ?

Tant qu’aucune inflexion ne sera apportée à la trajectoire actuelle du gouvernement fédéral, nous continuerons à plaider, auprès de nos élus et dans la rue, pour que les choses changent.

Aidez-nous à porter ce message, signez notre pétition contre le désinvestissement de l’Etat fédéral !

Prochaine manifestation nationale : contre les violences faites aux femmes 

Le dimanche 23 novembre, à Bruxelles, aura lieu une manifestation nationale contre les violences faites aux femmes. Des dizaines d’organisations féministes, sociales, citoyennes et syndicales défileront ensemble à cette occasion. En effet, de nombreuses mesures du gouvernement fédéral frappent d’abord le genre féminin.

Infos pratiques  

  • Date : dimanche 23 novembre
  • Heure et lieu de RDV : départ à 14h – Place Poelart (Bruxelles)
  • Itinéraire : de la Place Poelaert au Parvis de Saint-Gilles

Sources 

[1] Ciré asbl : « Politique de non-accueil: état des lieux – 2025 »

[2] Vivalis : « Projet de limitation de la durée d’octroi des allocations de chômage à deux ans : le devenir possible des exclus du chômage et effets potentiels sur les CPAS »

[3] La DH : « Médecins et malades de longue durée sous surveillance, « l’Arizona ouvre la porte à une véritable chasse aux sorcières : dans quel pays vit-on ? »

[4] Le Vif : « Dons aux sans-abri : pourquoi la baisse de la déduction fiscale inquiète les associations »

[5] La Libre : « Les acteurs de l’aide alimentaire alertent sur la baisse de leur budget »

[6] Parlement Bruxellois : « Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et Assemblée réunie de la COCOM : séance plénière du 26 septembre 2025 »

Plan Grand Froid arrêt subsides fédéraux
Plan Grand Froid : une pétition contre les coupes du Fédéral 1024 576 L'Ilot

Plan Grand Froid : une pétition contre les coupes du Fédéral

Plan Grand Froid : une pétition contre les coupes du Fédéral

Sommaire :

L’annonce est tombée : le gouvernement fédéral a décidé de stopper son financement du Plan Grand Froid. Dès cet hiver 2025, les villes d’Anvers, Bruxelles, Charleroi, Gand et Liège perdront ainsi au total 325 000 euros. Des moyens qui finançaient pourtant directement des lits et du personnel supplémentaire pour accueillir les personnes qui sont contraintes de dormir en rue. 

Alors que près de 50 000 personnes sont déjà sans logement en Belgique, cette mesure s’ajoute à la liste des choix fédéraux récents qui fragilisent et mettent en danger les personnes les plus vulnérables. Et ce, alors même que la Belgique s’est engagée à mettre fin au sans-abrisme d’ici 2030 (Déclaration de Lisbonne).   

Au côté d’autres organisations du secteur sans abri, L’Ilot dénonce donc fermement cette décision du gouvernement fédéral. Nous comptons sur votre voix citoyenne pour rappeler aux responsables politiques que la lutte contre le sans-abrisme n’est pas un slogan, mais une urgence humaine et sociale. 

Qu’est-ce que le Plan Grand Froid ? 

Le Plan Grand Froid est un dispositif qui permettait jusqu’ici à 5 grandes villes de mettre en place des réponses adaptées de jour et de nuit pour l’accueil des personnes sans abri – hommes, femmes et familles avec enfants – quand la température passe sous un certain niveau. 

 L’objectif du dispositif 

L’objectif du Plan Grand Froid est clair : il s’agit d’assurer la prise en charge des personnes les plus précarisées ou vivant dans la rue, en cas de conditions climatiques très rudes [1].   

Cette action consiste ainsi à mobiliser le maximum de ressources locales publiques et associatives, afin de répondre le plus possible aux besoins des publics précarisés durant cette période plus que difficile pour eux [2]. 

Qui déclenche le Plan Grand Froid ?  

Jusqu’ici, le Plan Grand Froid était financé à la fois par les régions mais aussi le gouvernement fédéral, qui a décidé d’arrêter son financement dès cet hiver 2025.  

Résultat : les CPAS d’Anvers, Bruxelles, Charleroi, Gand et Liège perdront chacune 65 000 euros, soit un tiers du total des subsides dédiés [3]. Des subsides pourtant essentiels pour financer du personnel supplémentaire et assurer “la création de centaines de lits supplémentaires dans les centres d’hébergement pour sans-abri entre novembre et mars” [4].

« On parle de moyens qui financent directement des lits pour des personnes qui, sans cela, dormiraient dans la rue. Le défi en matière de sans-abrisme est énorme, et nous prenons nos responsabilités […] Mais nous ne pouvons y arriver seuls« .  

Astrid De Bruycker, échevine de Gand (source : RTBF) 

À Bruxelles, le financement fédéral permettait de rémunérer deux mi-temps au CPAS de la Ville [5].

Signez notre pétition contre le désinvestissement du gouvernement fédéral 

Nos organisations dénoncent la décision du gouvernement fédéral de supprimer les subsides du Plan Grand Froid. Alors que 50 000 personnes sont sans logement en Belgique, les choix fédéraux récents fragilisent et mettent en danger les personnes les plus vulnérables: 

  • diminution drastique des droits sociaux ; 
  • exclusions du chômage ; 
  • précarisation des femmes et des étudiant·es ; 
  • politique de non-accueil ;  
  • diminution de la déduction fiscale sur les dons, etc.  

Autant de mesures qui vont augmenter la précarité et le nombre de personnes sans chez-soi. Dans ce contexte, il est d’autant plus inexplicable que le fédéral choisisse de couper ses financements du Plan Grand Froid. 

Ce désengagement est également incohérent. Il contredit la Déclaration de Lisbonne, qui engage la Belgique à mettre fin au sans-abrisme d’ici 2030 ; mais aussi l’Accord de coopération sur le sans-abrisme de 2014, qui reconnaît la nécessité d’une action concertée entre l’État fédéral, les communautés et les régions. 

 C’est pourquoi nous formulons ces demandes au gouvernement fédéral: 

  1. le rencontrer au plus vite pour exposer nos revendications, proposer des solutions concrètes et entendre quelles actions elles comptent mettre en place ;
  2. revenir sur la décision fédérale de désinvestissement ;
  3. rendre l’Accord de coopération 2014 entre État fédéral, communautés et régions opérationnel ;
  4. activer le Groupe de travail sans-abrisme de la Conférence interministérielle ‘Intégration sociale, logement et politique des grandes villes’ ;
  5. Soutenir une politique structurelle, durable et coordonnée pour lutter contre le sans abrisme 

 Nous avons besoin de vous ! Signez cette pétition pour rappeler aux responsables politiques que la lutte contre le sans-abrisme n’est pas un slogan, mais une urgence humaine et sociale. 

Les organisations participantes 

Infirmiers de Rue, L’Ilot, Brussels Platform Armoede (BPA), BelRefugees, AMA – Fédération des maisons d’accueil et des services d’aide aux sans-abri, RWDH, DUNE ASBL, ASBL Benoît et Michel, DoucheFLUX, RestoJet, Pierre d’Angle, La Maison Rue Verte, Le Home Victor du Pré, ASBL Les Trois Portes, Espace Social Télé-Service “La Consigne Article 23”, Plateforme pour l’Interculturalité à Tournai ASBL, asbl DIOGENES vzw, Source asbl, NATIVITAS asbl/vzw, ASBL Le Triangle, asbl Accueil Montfort, Asbl Escale – Onderweg vzw, MACADAM Asbl/Vzw, Le Refuge LGBTQIA+ Opvanghuis, Alias asbl, Comité de la Samaritaine asbl/vzw, ASBL IMP La Providence – service Proximam, La Fontaine, Maison maternelle Paul Henricot, L’Entraide de Saint-Gilles, L’Eglantier, Fédération BICO, Un Toit Un Coeur et Hobo vzw 

Sources

bande dessinée sans-abrisme
Comic strip festival : notre BD sur le travail précaire en finale 1024 576 L'Ilot

Comic strip festival : notre BD sur le travail précaire en finale

Comic strip festival : notre bande dessinée sur le travail précaire en finale du prix Atomium 2025 

Sommaire :

  1. Le Comic Strip Festival 2025 : un événement incontournable
  • Un festival BD unique en Belgique  
  • Informations pratiques sur le Comic Strip Festival 2025 

2. Une bande dessinée sur le travail précaire en finale du Comic Strip Festival 2025

  • Pourquoi le Prix Atomium de la bande dessinée citoyenne est-il important ?  
  • « Un petit expresso sans sucre » : une bande dessinée engagée sur le travail précaire

Du 26 au 28 septembre 2025, le Comic Strip Festival transformera la Gare Maritime de Tour & Taxis en véritable temple de la bande dessinée. C’est dans ce cadre exceptionnel que sera décerné le Prix Atomium de la BD citoyenne, récompensant les œuvres qui osent aborder les défis de notre époque avec justesse et humanité. 

Cette année, la bande dessinée « Un petit expresso sans sucre » de L’Ilot figure parmi les 15 finalistes de cette prestigieuse distinction. Une belle reconnaissance pour le travail de notre association, mais surtout un coup de projecteur essentiel sur la réalité des travailleur·euses précaires sans abri en Belgique.  

Le Comic Strip Festival 2025 : un événement incontournable

Un festival BD unique en Belgique  

Depuis sa création, le Comic Strip Festival est devenu un rendez-vous majeur pour les amateur·ices de bande dessinée en Belgique et au-delà. Il offre une plateforme unique pour découvrir de nouveaux talents, célébrer des œuvres emblématiques et discuter des enjeux contemporains à travers le prisme de la BD. L’introduction du Prix Atomium en 2017 a renforcé l’engagement du festival envers la reconnaissance de la diversité et de la vitalité du neuvième art.  

Informations pratiques sur le Comic Strip Festival 2025

Le Comic Strip Festival se déroulera du 26 au 28 septembre 2025 à la Gare Maritime de Tour & Taxis (Bruxelles). L’évènement est gratuit. Au programme : expositions, ateliers, rencontres, dédicaces, projections et animations pour tous les âges.   

Une bande dessinée sur le travail précaire en finale du Comic Strip Festival 2025

Pourquoi le Prix Atomium de la bande dessinée citoyenne est-il important ?

Décerné chaque année au Comic Strip Festival, le Prix Atomium de la BD citoyenne récompense un album qui suscite une réflexion éthique et sociétale, abordant de manière constructive des enjeux contemporains. Le prix soutient ainsi les artistes engagé·es qui utilisent la bande dessinée comme moyen d’expression pour des causes sociales importantes.  

La nomination de notre BD pour ce prix constitue donc un bel accomplissement pour le travail quotidien de L’Ilot… mais aussi un coup de projecteur essentiel sur les souffrances invisibles liées au travail précaire. Une situation dramatique que l’instabilité des contrats (intérim, CDD, flexijobs, etc.) ne fait que favoriser, en touchant d’ailleurs davantage les femmes que les hommes.La précarité dans l’emploi recouvre une dimension de genre : les emplois à temps partiel ou encore les contrats à durée déterminée concernent plus particulièrement le sexe féminin. 

« Aujourdʼhui, nous vivons dans une société où des personnes perçoivent des pensions de 6 000 euros tandis que dʼautres, souvent des femmes, doivent se contenter de moins de 800 euros par mois. Cʼest indéfendable. » 

Philippe Defeyt, économiste et ancien président du CPAS de Namur

« Un petit expresso sans sucre » : une bande dessinée engagée sur le travail précaire

Réalisée par L’Ilot en collaboration avec Abdel de Bruxelles et Alexandre de Moté, «Un petit expresso sans sucre» met en lumière les réalités des travailleur·euses précaires sans abri en Belgique. On plonge dans l’histoire de Steph’, un indépendant ruiné qui tente de cacher à ses proches qu’il vit dans sa camionnette.  

bande dessinée précarité sans abri

La trame reflète ainsi les situations réelles que traversent des milliers de personnes sans chez-soi accompagnées par L’Ilot : insécurité de l’emploi, perte d’un logement, érosion progressive des droits… Les équipes de nos maisons d’accueil le constatent chaque jour : le nombre de personnes qui ont un revenu mais ne sont pas en mesure d’assumer un loyer ne cesse d’augmenter. Les témoignages de femmes et d’hommes sans abri ne manquent pas.  

« Les propriétaires demandent parfois jusqu’à trois mois de loyer en avance. C’est impossible pour moi. Même avec un salaire régulier… » 

Nadine*

* Prénom d’emprunt. Nadine symbolise les milliers de travailleur·euses précaires sans abri qu’accompagne L’Ilot. 

pension Belgique : précarité personnes âgées
Pension en Belgique : la précarité des personnes âgées 1024 576 L'Ilot

Pension en Belgique : la précarité des personnes âgées

Pension en Belgique : plus de précarité pour les personnes âgées

Sommaire :

  • Un système de pension qui aggrave la précarité des personnes âgées
  • Vieillir dans la précarité : un phénomène en forte croissance
  • La pension, réel rempart contre la précarité des personnes âgées ?
  • Comment aider une personne âgée en situation de précarité ?
  • Sources 

Récemment amené par le gouvernement Arizona, l’accord de Pâques inclut une série de mesures qui touchent en profondeur le système sensible des pensions. De quoi nourrir l’inquiétude quand on sait que les prévisions de Statbel annoncent un vieillissement de la population belge dans les prochaines années.  

Déjà bien présente, la précarité des personnes âgées risque ainsi de s’aggraver de façon drastique. Une question se pose : vieillir demain en Belgique sera-t-il synonyme d’exclusion sociale ? 

Un système de pension qui aggrave la précarité des personnes âgées 

Afin d’inciter les Belges à prolonger leur carrière, le gouvernement a inscrit dans l’accord de Pâques un mécanisme de malus pension. Si vous souhaitez prendre votre retraite avant l’âge légal de 66 ans (67 ans en 2030), vous devrez ainsi subir une pénalité financière. La conséquence ? Les senior·es devront subvenir à leurs besoins durant une période allongée, alors même que beaucoup peinent à conserver un emploi ou à en retrouver un après 55 ans.  

Pour bénéficier du nouveau bonus-pension, vous serez obligé·e de travailler au-delà de l’âge légal de la retraite. Chaque année prestée augmentera alors un peu plus (2 %, 4 % ou 5 %) votre pension.  

Mais ce n’est pas tout. La limitation des allocations de chômage à 2 ans (dès 2026) charrie avec elle son lot d’inquiétudes. Pour être épargné·es par cette mesure, les 55 ans et plus devront prouver 30 ans de carrière (35 à partir de 2030). Le risque ? Une exclusion massive des chômeur·euses de cette catégorie d’âge… et un basculement dans la précarité pour les personnes âgées. 

Vieillir dans la précarité : un phénomène en forte croissance 

D’après une étude de Statbel, près de 20 % de la population belge courait déjà un risque de pauvreté ou d’exclusion sociale en 2024. Soit plus de 2 millions de personnes.   

On constate également que près de 18 % des 65 ans et plus étaient considéré·es comme « à risque de pauvreté », contre 13 % de la population globale. Autrement dit, les personnes âgées courent en Belgique un risque de pauvreté plus élevé que les autres. Le Bureau fédéral du Plan tire même la sonnette d’alarme : si aucune politique ne change la donne, cette situation préoccupante se dégradera dès le milieu des années 2050. 

Il est donc essentiel d’agir aujourd’hui, d’autant plus que le nombre de senior·es en Belgique explosera à l’avenir en raison d’un vieillissement démographique. D’après les projections de Statbel, le nombre de personnes âgées augmentera ainsi sensiblement dans les prochaines années.  

Si, en 2024, on comptait 28 personnes de 67 ans et plus pour 100 personnes de 18 à 66 ans, on en dénombrera 37 en 2040 et 43 en 2070. De quoi confirmer la thèse d’un vieillissement de la population.  

vieillissement démographique Belgique : précarité seniors

Proportion de personnes âgées de 67 ans et plus par rapport à la population en âge de travailler (source : Bureau fédéral du Plan

D’après les prévisions, l’espérance de vie moyenne augmentera pour atteindre, en 2070, 89,8 ans pour les femmes et 88,1 ans pour les hommes. Cette évolution génère ainsi des pressions sur le système de pension. D’ici 2040, on comptera un million de Belges de plus de 80 ans ! De nouvelles solutions doivent donc être trouvées pour garantir un équilibre économique. 

L’allongement de la durée de vie nécessite également une réflexion de fond quant aux structures d’accueil ou aux soins à domicile pour les personnes âgées. 

vieillissement démographique : pauvreté personnes âgées

L’évolution de l’espérance de vie à la naissance en Belgique (source : Statbel) 

La pension, réel rempart contre la précarité des personnes âgées ?  

Pour beaucoup de senior·es, la pension ne suffit déjà plus à couvrir un loyer, des soins médicaux ou même une alimentation décente. Il faut dire que le vieillissement à domicile coûte autour de 1 200 euros mensuels, sans compter les charges (loyer, énergie, nourriture, etc.). Avec un coût moyen de 2 084 € par mois, la maison de repos constitue dans ce paysage peu enviable un luxe inaccessible pour la plupart.  

Un·e senior·e sur quatre vit sous le seuil de pauvreté à Bruxelles. Quand il n’y a plus de toit, de proches ou de solutions, la rue devient la seule issue. Aucune alternative n’est proposée à celles et ceux dont la pension est trop faible. En Belgique, près de 5 000 personnes âgées vivent sans chez-soi. Quand on perd son logement, il ne reste que la solitude, l’invisibilité, le silence et la violence… 

 Dans ce contexte déjà compliqué, les mesures actuelles du gouvernement Arizona ne feront qu’exposer encore davantage nos aîné·es au risque du sans-abrisme.  

Comment aider une personne âgée en situation de précarité ? 

Chaque jour, L’Ilot lutte contre la précarité des personnes âgées avec des moyens adaptés.  

  • Nos Centres de jour (tels que Circé) offrent un répit essentiel : un repas chaud, une douche, une écoute bienveillante ou encore un accompagnement social.  
  • Nos Maisons d’accueil proposent plus qu’un toit : un lit, des soins, mais surtout un soutien psychosocial sur mesure pour retrouver un logement durable. 
  • Nos Cuisines et notre Recyclerie forment à l’emploi.  

Grâce à ces services d’accompagnement, nous permettons à des senior·es épuisé·es par la vie en rue de se reconstruire et de retrouver une place digne dans la société.  

 “L’Ilot m’a soutenu de tous points de vue. D’abord, avec un toit pour dormir. Ensuite, en m’aidant à régler mes problèmes de pension et à remettre ma mutuelle en ordre. Enfin, ils m’ont permis d’ouvrir un compte en banque car j’ai pu prendre mon adresse officielle dans la Maison d’accueil.” 

Jean-Pierre, usager de L’Ilot 

 À 68, 72 ou 79 ans, personne ne devrait dormir dehors. Grâce à votre don, nous redonnons un peu de chaleur, de sécurité et d’espoir à celles et ceux qui n’ont plus rien… hormis le poids des années. Face à cette injustice silencieuse, votre soutien peut tout changer. 

Vous pouvez devenir acteur·ice du changement. 

travail précaire
Kart #9 Temps plein, poches vides | Des fins de mois impossibles malgré un emploi : témoignages 1024 576 L'Ilot

Kart #9 Temps plein, poches vides | Des fins de mois impossibles malgré un emploi : témoignages

En Belgique, de plus en plus de travailleurs peinent à boucler leurs fins de mois, malgré un emploi à temps plein. Pour beaucoup, les salaires ne suivent pas l’augmentation constante des loyers. Suite à la sortie de notre nouvelle publication sur les travailleurs et travailleuses précaires, nous avons récolté plusieurs témoignages autour de nous, que ce soit à L’Ilot ou dans notre entourage, concernant la thématique du travail précaire. Tous et toutes témoignent d’un même constat : travailler ne suffit plus pour vivre décemment.

Sylvia*, 36 ans, travailleuse sociale

« On m’a souvent parlé de la règle des 30%. Une règle selon laquelle le loyer d’un appartement ne doit pas dépasser 30% des revenus d’un ménage. Je suis travailleuse sociale, mon conjoint travaille à temps plein lui aussi. Nous avons cherché pendant deux ans à nous loger à Bruxelles en tenant compte de cet adage des 30%. Force est de constater que c’est devenu impossible. Aujourd’hui pour se loger, il faut se mettre en danger financièrement. »

Zakaria*, 51 ans, père de 3 enfants

« C’est devenu impossible en 2024 de vivre convenablement de ses revenus. Avant mes quelques économies me permettaient parfois de partir en vacances, de faire l’un ou l’autre cadeau à mes enfants ou à mes proches. Aujourd’hui, elles m’autorisent tout juste à régler mes factures et à faire face à l’un ou l’autre imprévus. Je suis en permanence sur la corde. »

Blandine*, 24 ans, jeune travailleuse

« J’ai 24 ans, je travaille à plein temps, mais ça ne change rien : avec les garanties locatives de plus en plus élevées, aucun propriétaire ne veut de moi, même avec un emploi à plein temps. Les propriétaires demandent des montants incroyables, parfois jusqu’à trois mois de loyer en avance, juste pour accepter de me louer un appartement. C’est impossible pour moi, même avec un salaire régulier. J’essaie de montrer que je suis sérieuse, que je travaille et que je peux payer, mais c’est jamais suffisant pour eux. Je me retrouve à rester chez des amis ou à chercher des logements précaires parce que je ne peux jamais réunir ces garanties exorbitantes. C’est vraiment décourageant de se dire que, malgré mon travail, je ne peux même pas accéder à un logement stable. »

Jean-Pierre*, 70 ans, travailleur à la retraite

« J’ai pris ma retraite il y a trois ans, mais au lieu de me reposer, je dois continuer à travailler parce que ma pension ne couvre même pas le loyer. Je pensais pouvoir enfin souffler après une vie de boulot, mais entre les loyers qui explosent et les factures qui tombent chaque mois, je n’arrive pas à m’en sortir. C’est épuisant, je me demande souvent quand je pourrai vraiment profiter de ma retraite, ou si ce moment viendra un jour. »

Mariam*, 31 ans, travailleuse à plein temps

« Malgré mon salaire, le loyer engloutit plus de la moitié de ce que je gagne, et chaque mois, je me retrouve à devoir choisir entre payer mon loyer à temps ou me nourrir correctement. Même en travaillant à plein temps, j’ai l’impression que ce n’est jamais suffisant pour vivre décemment. Les factures s’accumulent, tout devient plus cher, mais mon salaire, lui, ne bouge pas. Ce n’est pas normal de travailler autant et de ne pas pouvoir boucler ses fins de mois. On bosse dur, mais on survit à peine. »

Moussa*, 19 ans, personne sans papiers

« Sans papiers, je galère déjà à trouver du travail, mais quand j’en trouve, c’est souvent pour des salaires de misère parce que certains abusent de ma situation. À la fin du mois, impossible de payer mon loyer correctement. Et en plus, je fais face au racisme : les propriétaires et les employeurs me ferment la porte juste à cause de mes origines. J’ai l’impression d’être coincé dans une double précarité, celle de ne pas avoir de papiers et celle d’être jugé sur qui je suis. »

Et vous ? Comment faites-vous face à cette situation ? Est-ce que votre travail vous permet de vivre de vos revenus ? Quel est le % de votre salaire que vous mettez dans votre loyer ? Est-ce que vous connaissez des personnes qui vivent la même situation ? Envoyez-nous votre témoignage en 4-5 lignes à presse@ilot.be. Nous en repartagerons certains d’entre eux de manière anonymisée sur notre page Instagram. Merci d’avance à tous et à toutes pour votre participation !

*prénom d’emprunt.

Kart #9 Temps plein, poches vides | Témoignages 1024 576 L'Ilot

Kart #9 Temps plein, poches vides | Témoignages

Extrait de la bande dessinée avec Abdel de Bruxelles « Un petit expresso sans sucre » qui retrace le parcours de Steph’, un indépendant qui n’arrive plus, malgré son travail, à s’en sortir financièrement.

Des « costumes-cravate » sans chez-soi : la réalité de l’accueil des travailleuses et travailleurs précaires parmi nos publics n’est pas neuve. Équipe sociale et résident·es de nos maisons d’accueil témoignent.

« La tendance est à la hausse »

C’est ce que confirme Alexandra Todeanca, coordinatrice de la Maison d’accueil pour hommes de L’Ilot à Bruxelles. « De plus en plus, nous devons adapter notre accueil à celui de personnes dont le quotidien est de se lever pour aller travailler. Ce n’est évidemment pas la même dynamique d’accompagnement social. »

Des résidents et résidentes qui, bien qu’ayant un emploi, ne parviennent pas à subvenir à leurs besoins essentiels, notamment en matière de logement. Face à la hausse des loyers et à l’insuffisance des revenus, ils et elles se retrouvent dans nos Maisons d’accueil, en dépit de leur activité professionnelle. L’Ilot oeuvre activement pour apporter des solutions structurelles, en plaidant pour une meilleure protection sociale et un accès au logement décent pour toutes et tous ; et, ainsi, freiner l’engrenage infernal dans lequel les personnes vivant en rue tombent irrémédiablement, qu’elles soient travailleuses ou non.

« Aujourd’hui, mon travail ne me protège pas »

Sayli a 29 ans et avait, jusqu’il y a peu, toujours « connu les semaines pleines ». D’abord en salle puis en cuisine, comme « chef » et toujours dans « de grands restaurants ». Le genre de lieu « dans lequel on ne chôme pas ». Des journées de douze heures, six jours par semaine, Sayli connait. D’Atlanta à La Havane en repassant régulièrement par Bruxelles, Sayli mènera pendant des années une vie de backpacker en toque. Pour ses proches, il mène surtout « la grande vie » à l’autre bout du monde. Pour lui, il « se décarcasse pour vivre de sa passion ».

Il paie ses loyers par tranches, enchaîne les heures supplémentaires et les sacrifices qui vont avec. Les dérives aussi : alcool et dépendances le mèneront à un retour précipité en Belgique. Ses proches « tombent de haut ». Lui, fait profil bas. « Avant, pour eux, j’avais l’argent, la voiture, les costumes. Mais c’était plus une façade que le vrai moi. Qui devient riche grâce à son travail ? Eux pensaient que j’avais trouvé ma voie, moi j’étais conscient d’être en train de ruiner ma vie. » S’en suivront neuf jours en rue, ses premiers sans travailler depuis treize ans. Aux nuits dans le métro se succèdent les journées d’errance.

Un appel avec sa sœur lui fera connaitre L’Ilot et sa Maison d’accueil pour hommes, « Le 38 », qu’il intègre en juin dernier. Quelques jours plus tard, revigoré, Sayli trouvera un travail « en deux heures, mais dans un Carrefour Express ». Un temps plein, mais pas franchement le boulot de ses rêves pour celui qui entame en parallèle des études pour devenir éducateur spécialisé. Sayli ne perd pas la face mais ne veut pas que sa situation soit connue de ses collègues. « Ce serait trop louche. » Alors, « pour eux », il est « le bon samaritain toujours bien sapé » qui va porter les invendus du jour « aux SDF ». Pour ses nouveaux colocataires de L’Ilot, il est le travailleur qui ramène des petits plats préparés en fin de journée. Une double vie que Sayli accepte de mener de front, sans sourciller. « Aujourd’hui mon travail ne me protège pas, pour ça il y a L’Ilot, mais je me dis que c’est une étape vers le retour à l’autonomie. »

bd travail précaire
Kart #9 Temps plein, poches vides | Entretien avec Philippe Defeyt 1024 576 L'Ilot

Kart #9 Temps plein, poches vides | Entretien avec Philippe Defeyt

Extrait de la bande dessinée avec Abdel de Bruxelles « Un petit expresso sans sucre » qui retrace le parcours de Steph’, un indépendant qui n’arrive plus, malgré son travail, à s’en sortir financièrement.

Économiste et ancien président du CPAS de Namur, Philippe Defeyt pose un regard critique sur la précarité grandissante des travailleurs et travailleuses en Belgique. Face à un système inadapté aux nouvelles réalités du travail, il questionne les outils actuels de mesure de la pauvreté et propose des réformes structurelles.

La pertinence relative des indicateurs de pauvreté

Pour Philippe Defeyt, il est indispensable de revoir la manière dont nous mesurons la pauvreté. « Le taux de pauvreté tel quʼon le calcule aujourdʼhui, à partir du revenu médian, ne reflète pas la réalité vécue par beaucoup de personnes. On peut très bien ne plus être pauvre selon les statistiques mais rester dans des conditions de vie précaires ou à lʼinverse être pauvre selon lʼindicateur mais bénéficier dʼaides matérielles multiples (logement social, déplacements gratuits, tarif social gaz, etc.) qui, de fait, protègent de la pauvreté. »

L’indicateur de pauvreté ignore des éléments comme le surendettement ou les coûts liés à la santé, qui affectent pourtant directement le niveau de vie. Philippe Defeyt plaide pour des indicateurs prenant en compte les dépenses réelles nécessaires pour mener une vie digne. « En Wallonie, si demain toutes les personnes en situation de pauvreté accèdent à des logements sociaux, voient leurs dettes effacées et reçoivent des repas gratuits, le taux de pauvreté tel qu’il est mesuré aujourd’hui resterait inchangé, car il ne se base que sur le revenu ! »

Il évoque également l’évolution des définitions de la pauvreté, qui restent des choix politiques ancrés dans leur époque : « Quand lʼEurope a décidé quʼune personne était considérée comme pauvre quand elle nʼatteignait pas 60 % du revenu médian – alors que la norme jusque-là était en Belgique de 50 % du revenu moyen -, le taux de pauvreté a presque doublé dans notre pays, passant de 7 % à 15 % ! Ce quʼil faut aujourdʼhui, ce sont des indicateurs qui reflètent le niveau de vie réel, et pas seulement les revenus. » 

Les travailleurs et travailleuses pauvres et le risque de sans-abrisme

Sur la question des travailleurs et travailleuses précaires, Philippe Defeyt met en garde contre les amalgames. « Dire quʼun travailleur est pauvre simplement parce quʼil a un salaire bas brouille les cartes. Ce qui compte, cʼest le ménage dans lequel il vit : le même salaire si vous êtes isolé ou si vous avez trois personnes à charge ce nʼest pas la même chose. »

L’instabilité des contrats (intérim, CDD, flexijobs) expose des travailleurs et des travailleuses à un risque accru de précarité. « Plus les revenus sont fractionnés, plus le risque de devenir un ou une travailleuse pauvre est élevé. Et si ces personnes perdent leur emploi, elles risquent de ne jamais atteindre les quotas nécessaires pour ouvrir leurs droits au chômage. La législation nʼest tout simplement pas adaptée à leur situation. »

Sans oublier que la précarité dans l’emploi a aussi une dimension de genre : les emplois à temps partiel, les contrats à durée déterminée, concernent davantage les femmes que les hommes. « Aujourdʼhui, nous vivons dans une société où des personnes perçoivent des pensions de 6 000 euros tandis que dʼautres, souvent des femmes, doivent se contenter de moins de 800 euros par mois. Cʼest indéfendable. »

Philippe Defeyt s’inquiète également de l’augmentation du sans-abrisme, particulièrement à Bruxelles. « La situation est en train d’empirer, et ce nʼest pas uniquement dû aux sans-papiers. Même en les excluant des chiffres, le nombre de personnes sans abri augmente. Et derrière cette réalité, il y a souvent des parcours de vie marqués par des problèmes de santé mentale qui aggravent leur précarité. » Il rappelle que pour certaines personnes, des programmes comme « Housing First » (qui proposent un logement stable avant tout autre accompagnement) fonctionnent bien, mais que ce n’est pas une solution universelle, insistant sur l’importance de la recons-truction d’un réseau social autour de la personne (ndlr : comme le fait S.Ac.A.Do., le service d’accompagnement à domicile de L’Ilot).

bd travail précaire
Kart #9 Temps plein, poches vides | Éditorial 1024 576 L'Ilot

Kart #9 Temps plein, poches vides | Éditorial

Extrait de la bande dessinée avec Abdel de Bruxelles « Un petit expresso sans sucre » qui retrace le parcours de Steph’, un indépendant qui n’arrive plus, malgré son travail, à s’en sortir financièrement.

Les crises successives – financière, économique, sanitaire, sociale – ont fragilisé notre société, frappant durement les travailleuses et travailleurs précaires. Notre association, active contre le sans-abrisme, en témoigne quotidiennement : des milliers de personnes font face à l’insécurité de l’emploi, à la perte de logement et à une érosion progressive de leurs droits.

Un peu partout dans le monde, l’extrême-droitisation des débats politiques a notamment pour conséquence de marginaliser les personnes les plus fragiles. En Belgique, la récente modification du paysage politique annonce des réformes qui semblent privilégier la flexibilité du travail au détriment de la sécurité. Dans un climat d’installation de nouveaux gouvernements à différents niveaux de pouvoir, il est crucial de remettre les droits des travailleurs et travailleuses précaires au centre du débat.

À L’Ilot, nous refusons de traiter uniquement les symptômes de la précarité. Nous offrons un accompagnement global, avec l’objectif que les personnes puissent retrouver une stabilité professionnelle et une autonomie durable. Collaborant au quotidien avec les autorités politiques et publiques, nous plaidons pour des réformes politiques ambitieuses, ciblant le logement abordable, l’automatisation des droits, la sécurisation de l’emploi, l’individualisation des droits sociaux ou encore l’accès aux services de santé mentale.

Notre pays, nos régions, doivent devenir des territoires de solidarité, où chaque travailleur ou travailleuse pourra retrouver dignité et espoir. C’est dans cet esprit que nous collaborons avec Abdel de Bruxelles, auteur de BD engagé, qui a à coeur de mettre en lumière les souffrances liées au travail précaire. Son oeuvre, dont vous pourrez
admirer les prémisses dans ces pages, sera bientôt disponible via tous nos canaux de communication.

Bonne lecture !

Ariane Dierickx, directrice de L’Ilot

travailleurs précaires
Temps plein, poches vides : quand le travail ne protège plus de la précarité 1024 576 L'Ilot

Temps plein, poches vides : quand le travail ne protège plus de la précarité

Un loyer qui augmente, des prix qui ne cessent de s’enflammer, un marché de l’emploi qui favorise l’ère de l’ubérisation maximale (dans laquelle les personnes engagées sont forcées de passer sous le régime indépendant, sans plus aucune sécurité). Voici le dangereux mélange qui nous menace toutes et tous, qui pourrait tout nous faire perdre ! En 2024, plus de 2,1 millions de Belges courent un réel risque de pauvreté ou d’exclusion sociale [1].

Avec 1426 euros mensuels, le statut d’Emmanuel est devenu celui d’une personne vivant sous le seuil de pauvreté [2].  Loin d’être un cas isolé, de plus en plus de travailleuses et travailleurs arrivent chaque jour dans nos services n’ayant plus les moyens de se loger. Ces femmes et ces hommes, souvent invisibles aux yeux de la société, luttent quotidiennement pour joindre les deux bouts. Leur courage et leur ambition demeurent puissants et se voient parfois engloutis bien rapidement par une dynamique mortifère : une faillite, une maladie, une accumulation de factures, etc. Et la hausse des prix qui s’amuse sans vergogne à jouer avec ces vies.

Le travail ne protège plus de la pauvreté. Vos dons sont nécessaires et permettent à nos services d’accueil d’assurer un lieu de réconfort, un toit pour plusieurs mois, mais aussi un espace de travail et de rencontre pour que ces travailleuses et travailleurs sans abri puissent se reconstruire, retrouver l’estime de soi et restaurer leurs droits. Grâce à vous, l’Ilot propose un accompagnement au long cours pour permettre à chacun et chacune d’aller de l’avant, de retrouver confiance et d’envisager à nouveau une trajectoire de vie épanouissante.

La réalité est criante : l’indexation des salaires ne permet plus de compenser l’augmentation des prix et certains barèmes salariaux ne rencontrent plus le coût de la vie. Davantage de travailleurs et travailleuses basculent dans le champ de l’urgence sociale, de l’aide alimentaire ou encore de l’aide énergétique. La précarité des travailleurs et des travailleuses est un fléau silencieux.

Votre soutien est essentiel pour nous permettre de poursuivre efficacement nos missions d’accompagnement.

*Prénom d’emprunt. Nos témoignages sont reconstitués d’après plusieurs expériences de terrain pour ne pas mettre en péril l’anonymat de nos usagers et usagères.

[1] https://statbel.fgov.be/fr/themes/menages/pauvrete-et-conditions-de-vie/risque-de-pauvrete-ou-dexclusion-sociale#news

[2] En Belgique, le seuil de pauvreté s’élève à 1.450 € par mois pour une personne seule et à 3.045 € pour un ménage de deux adultes avec deux enfants.

Photo : ©Towfiqu Barbhuiya