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Un Centre de jour par et pour les femmes 1024 608 L'Ilot

Un Centre de jour par et pour les femmes

Alertés par des chiffres qui semblaient incohérents compte tenu de la réalité de la pauvreté des femmes en Belgique mais aussi par des retours de terrain indiquant une grande difficulté de notre secteur à accompagner correctement les femmes vivant en rue, il nous a paru indispensable de mener une étude-action afin de mieux comprendre les trajectoires qui amènent les femmes en rue et sonder leurs besoins spécifiques. C’est ce que nous avons réalisé en 2021 et nos constats sont sans appel : le nombre de femmes sans abri ou mal logées est largement sous-évalué et l’offre de services ne leur est pas adaptée alors qu’elles subissent plus de violences que leurs homologues masculins.

La sous-évaluation du nombre de femmes sans abri est notamment liée à ce qu’on appelle le « sans-abrisme caché » qui les touche davantage : pour éviter la rue, elles dorment une nuit chez une amie, la suivante dans une voiture, etc. et finissent par passer sous les radars, disparaissant des statistiques. Ayant pour la plupart connu des parcours de violences (conjugales et intrafamiliales le plus souvent, mais aussi des violences sexuelles et/ou des violences liées à la traite des êtres humains ou encore à l’exil) avant de perdre leur logement, ces femmes vont, une fois en rue, vivre à nouveau sous la constante menace d’agressions multiples. Elles adoptent donc des stratégies d’invisibilisation : elles se masculinisent, négligent volontairement leur hygiène ou se déplacent sans cesse, ce qui contribue non seulement à les rendre invisibles, mais affecte aussi fortement leur santé physique et mentale.

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Face à ces trajectoires faites de violences, l’offre de services proposée par notre secteur n’est pas (suffisamment) adaptée aux besoins des femmes : les structures mixtes ne fonctionnent pas, car elles sont majoritairement occupées par des hommes et la mixité est insurmontable pour certaines victimes de violences graves. De ce fait, les femmes évitent ces lieux, comme en attestent les chiffres de fréquentation de nos services.

Dans une démarche intersectorielle et avec l’aide d’un groupe d’expertes du vécu, nous avons donc développé une série de recommandations pour proposer des solutions dignes et durables à ces constatations, dont la création d’un centre de jour par et pour les femmes.

Dans la lignée de nos valeurs, ce centre sera basé sur l’autonomie des bénéficiaires. Grâce à une formation des équipes sur les violences de genre et sur l’ensemble des enjeux liés aux droits des femmes, il s’agira d’un lieu où les femmes pourront se sentir en sécurité et où leur expérience sera valorisée.

Outre les besoins spécifiques des femmes, cette nouvelle structure aura également un impact sur les enfants. En effet, on sait que près de 20 % d’enfants sans abri dénombrés dans notre secteur accompagnent dans la très grande majorité des cas leur mère, et que les familles monoparentales sont presque exclusivement soutenues à bout de bras par les femmes. En agissant sur les mères, nous évitons que la précarité ne se transmette de génération en génération et que ces enfants ne deviennent, à leur tour, des adultes sans abri.

*prénom d'emprunt

>> Retrouvez notre rapport d'activité dans son intégralité.

Service d’Installation en Logement 1024 734 L'Ilot

Service d’Installation en Logement

Déménagement, emménagement, mise à disposition de matériel et de meubles, installation de mobilier, nettoyage, réparations, petits travaux, sont autant d’actions concrètes offertes par le SIL, notre Service dʼInstallation en Logement, qui travaille dans une démarche sectorielle pour l’ensemble des personnes sans abri fréquentant des services bruxellois.

Créé en plein milieu de la crise sanitaire, le SIL est actif depuis novembre 2020 et a pour mission de proposer un accompagnement logistique aux personnes sans abri lors de leur mise en logement. Il les aide à s’approprier leur nouveau lieu de vie pour qu’elles se sentent vraiment chez elles. Choisir (et recevoir gratuitement) des meubles, de l’électroménager, des éléments de décoration et autres, contribue à personnaliser le nouvel intérieur, ce qui renforce la dignité des personnes accompagnées et leur lien à leur logement, augmentant leurs chances de le garder.

>> Retrouvez notre rapport d'activité dans son intégralité.

Enfance et rue : no future ? 900 414 L'Ilot

Enfance et rue : no future ?

Illustration Prisca Jourdain

Mes jeunes années ont été heureuses sur bien des points et elles ont fortement contribué à faire de moi une adulte épanouie et solide. Celles de mon fils et mes deux filles ont suivi et suivent encore le même chemin : scolarité ininterrompue, nourriture équilibrée, fêtes d’anniversaire avec les copains et copines, chambre à soi, entraînement de basket et cours de musique… La norme ? Pas pour tout le monde : beaucoup trop d’enfants, privés de ces besoins fondamentaux, vivent, avec leurs parents, parfois un seul, parfois aucun, en marge d’une société – la nôtre – sans que nous ayons la capacité de répondre à leurs besoins fondamentaux.

Subir l’exclusion alors qu’on n’est encore qu’un nourrisson ? Hors de question ! Et pourtant, cette situation révoltante s’aggrave : on observe une augmentation plus qu’inquiétante du nombre de familles en situation de sans-abrisme. Les derniers dénombrements estiment que 20 % des personnes sans abri sont des enfants ! Et le phénomène, loin de diminuer, s’accélère de manière dramatique. 

De plus en plus de familles sans abri ou en risque de sans-abrisme – souvent portées à bout de bras par des mamans solo – font appel à nos services pour s’en sortir. Mais le manque criant de solutions pérennes que notre secteur peut leur apporter creuse toujours un peu plus le fossé qui les sépare d’un futur digne, dans un chez-soi bien chauffé, avec un frigo suffisamment rempli, sans la menace d’un huissier ni la peur d’une expulsion … 

Mettre en place des réponses adéquates et coordonnées pour les parents, c’est sortir leurs enfants de la boucle du déterminisme social, éviter que la précarité ne se transmette de génération en génération. Car une famille qui n’a pas de logement aujourd’hui risque de mettre des années à sortir de la précarité et tout ce qu’elle entraîne : non accès à une alimentation saine, détérioration de la santé physique et mentale, risque accru de violences conjugales et/ou intrafamiliales, non accès à la culture et aux loisirs, etc. Vivre sans toit, sans droits, c’est la condamnation à un travail de reconstruction extrêmement lourd, quand celui-ci est seulement envisageable. Pour les enfants, c’est aussi le risque d’un parcours scolaire perturbé ou brutalement interrompu, le renoncement aux loisirs, la perte de confiance en soi… L’insouciance et la légèreté font place à la peur et au sentiment d’insécurité. Ces enfants grandissent trop vite et portent dans leur sac à dos des problèmes qui ne devraient pas les concerner.

Je suis persuadée que les solutions durables pour toutes celles et ceux qui sont confrontés au sans-abrisme et au mal logement devront être pensées ensemble. Le décloisonnement sectoriel mais aussi un travail coordonné entre les responsables politiques et les associations de terrain sont plus que nécessaires pour que les droits des femmes, des jeunes ou des enfants soient, un jour, pris en compte et rencontrés dans une dynamique globale. Les lignes budgétaires comme elles sont pensées à l’heure actuelle ne permettent que trop rarement d’avancer dans cette logique d’intersectorialité.

Sans ce travail coordonné, sans moyens financiers conséquents, toujours trop d’enfants continueront à subir la pauvreté et l’exclusion au quotidien, seront privés dans les années à venir de leur droit fondamental au bonheur et à l’insouciance. 

Il en va de notre responsabilité à tous et toutes. Leur avenir est entre nos mains.

Ariane Dierickx, directrice de L’Ilot