Prix fédéral de lutte contre la pauvreté : votez pour ISSUE
Cette année, le Prix fédéral de lutte contre la pauvreté récompensera les partenariats mis en place pour lutter préventivement ou curativement contre la pauvreté.
Cette année, le Prix fédéral de lutte contre la pauvreté récompensera les partenariats mis en place pour lutter préventivement ou curativement contre la pauvreté.
Extrait de la bande dessinée avec Abdel de Bruxelles « Un petit expresso sans sucre » qui retrace le parcours de Steph’, un indépendant qui n’arrive plus, malgré son travail, à s’en sortir financièrement.
Des « costumes-cravate » sans chez-soi : la réalité de l’accueil des travailleuses et travailleurs précaires parmi nos publics n’est pas neuve. Équipe sociale et résident·es de nos maisons d’accueil témoignent.
C’est ce que confirme Alexandra Todeanca, coordinatrice de la Maison d’accueil pour hommes de L’Ilot à Bruxelles. « De plus en plus, nous devons adapter notre accueil à celui de personnes dont le quotidien est de se lever pour aller travailler. Ce n’est évidemment pas la même dynamique d’accompagnement social. »
Des résidents et résidentes qui, bien qu’ayant un emploi, ne parviennent pas à subvenir à leurs besoins essentiels, notamment en matière de logement. Face à la hausse des loyers et à l’insuffisance des revenus, ils et elles se retrouvent dans nos Maisons d’accueil, en dépit de leur activité professionnelle. L’Ilot oeuvre activement pour apporter des solutions structurelles, en plaidant pour une meilleure protection sociale et un accès au logement décent pour toutes et tous ; et, ainsi, freiner l’engrenage infernal dans lequel les personnes vivant en rue tombent irrémédiablement, qu’elles soient travailleuses ou non.
Sayli a 29 ans et avait, jusqu’il y a peu, toujours « connu les semaines pleines ». D’abord en salle puis en cuisine, comme « chef » et toujours dans « de grands restaurants ». Le genre de lieu « dans lequel on ne chôme pas ». Des journées de douze heures, six jours par semaine, Sayli connait. D’Atlanta à La Havane en repassant régulièrement par Bruxelles, Sayli mènera pendant des années une vie de backpacker en toque. Pour ses proches, il mène surtout « la grande vie » à l’autre bout du monde. Pour lui, il « se décarcasse pour vivre de sa passion ».
Il paie ses loyers par tranches, enchaîne les heures supplémentaires et les sacrifices qui vont avec. Les dérives aussi : alcool et dépendances le mèneront à un retour précipité en Belgique. Ses proches « tombent de haut ». Lui, fait profil bas. « Avant, pour eux, j’avais l’argent, la voiture, les costumes. Mais c’était plus une façade que le vrai moi. Qui devient riche grâce à son travail ? Eux pensaient que j’avais trouvé ma voie, moi j’étais conscient d’être en train de ruiner ma vie. » S’en suivront neuf jours en rue, ses premiers sans travailler depuis treize ans. Aux nuits dans le métro se succèdent les journées d’errance.
Un appel avec sa sœur lui fera connaitre L’Ilot et sa Maison d’accueil pour hommes, « Le 38 », qu’il intègre en juin dernier. Quelques jours plus tard, revigoré, Sayli trouvera un travail « en deux heures, mais dans un Carrefour Express ». Un temps plein, mais pas franchement le boulot de ses rêves pour celui qui entame en parallèle des études pour devenir éducateur spécialisé. Sayli ne perd pas la face mais ne veut pas que sa situation soit connue de ses collègues. « Ce serait trop louche. » Alors, « pour eux », il est « le bon samaritain toujours bien sapé » qui va porter les invendus du jour « aux SDF ». Pour ses nouveaux colocataires de L’Ilot, il est le travailleur qui ramène des petits plats préparés en fin de journée. Une double vie que Sayli accepte de mener de front, sans sourciller. « Aujourd’hui mon travail ne me protège pas, pour ça il y a L’Ilot, mais je me dis que c’est une étape vers le retour à l’autonomie. »
Extrait de la bande dessinée avec Abdel de Bruxelles « Un petit expresso sans sucre » qui retrace le parcours de Steph’, un indépendant qui n’arrive plus, malgré son travail, à s’en sortir financièrement.
Économiste et ancien président du CPAS de Namur, Philippe Defeyt pose un regard critique sur la précarité grandissante des travailleurs et travailleuses en Belgique. Face à un système inadapté aux nouvelles réalités du travail, il questionne les outils actuels de mesure de la pauvreté et propose des réformes structurelles.
Pour Philippe Defeyt, il est indispensable de revoir la manière dont nous mesurons la pauvreté. « Le taux de pauvreté tel quʼon le calcule aujourdʼhui, à partir du revenu médian, ne reflète pas la réalité vécue par beaucoup de personnes. On peut très bien ne plus être pauvre selon les statistiques mais rester dans des conditions de vie précaires ou à lʼinverse être pauvre selon lʼindicateur mais bénéficier dʼaides matérielles multiples (logement social, déplacements gratuits, tarif social gaz, etc.) qui, de fait, protègent de la pauvreté. »
L’indicateur de pauvreté ignore des éléments comme le surendettement ou les coûts liés à la santé, qui affectent pourtant directement le niveau de vie. Philippe Defeyt plaide pour des indicateurs prenant en compte les dépenses réelles nécessaires pour mener une vie digne. « En Wallonie, si demain toutes les personnes en situation de pauvreté accèdent à des logements sociaux, voient leurs dettes effacées et reçoivent des repas gratuits, le taux de pauvreté tel qu’il est mesuré aujourd’hui resterait inchangé, car il ne se base que sur le revenu ! »
Il évoque également l’évolution des définitions de la pauvreté, qui restent des choix politiques ancrés dans leur époque : « Quand lʼEurope a décidé quʼune personne était considérée comme pauvre quand elle nʼatteignait pas 60 % du revenu médian – alors que la norme jusque-là était en Belgique de 50 % du revenu moyen -, le taux de pauvreté a presque doublé dans notre pays, passant de 7 % à 15 % ! Ce quʼil faut aujourdʼhui, ce sont des indicateurs qui reflètent le niveau de vie réel, et pas seulement les revenus. »
Sur la question des travailleurs et travailleuses précaires, Philippe Defeyt met en garde contre les amalgames. « Dire quʼun travailleur est pauvre simplement parce quʼil a un salaire bas brouille les cartes. Ce qui compte, cʼest le ménage dans lequel il vit : le même salaire si vous êtes isolé ou si vous avez trois personnes à charge ce nʼest pas la même chose. »
L’instabilité des contrats (intérim, CDD, flexijobs) expose des travailleurs et des travailleuses à un risque accru de précarité. « Plus les revenus sont fractionnés, plus le risque de devenir un ou une travailleuse pauvre est élevé. Et si ces personnes perdent leur emploi, elles risquent de ne jamais atteindre les quotas nécessaires pour ouvrir leurs droits au chômage. La législation nʼest tout simplement pas adaptée à leur situation. »
Sans oublier que la précarité dans l’emploi a aussi une dimension de genre : les emplois à temps partiel, les contrats à durée déterminée, concernent davantage les femmes que les hommes. « Aujourdʼhui, nous vivons dans une société où des personnes perçoivent des pensions de 6 000 euros tandis que dʼautres, souvent des femmes, doivent se contenter de moins de 800 euros par mois. Cʼest indéfendable. »
Philippe Defeyt s’inquiète également de l’augmentation du sans-abrisme, particulièrement à Bruxelles. « La situation est en train d’empirer, et ce nʼest pas uniquement dû aux sans-papiers. Même en les excluant des chiffres, le nombre de personnes sans abri augmente. Et derrière cette réalité, il y a souvent des parcours de vie marqués par des problèmes de santé mentale qui aggravent leur précarité. » Il rappelle que pour certaines personnes, des programmes comme « Housing First » (qui proposent un logement stable avant tout autre accompagnement) fonctionnent bien, mais que ce n’est pas une solution universelle, insistant sur l’importance de la recons-truction d’un réseau social autour de la personne (ndlr : comme le fait S.Ac.A.Do., le service d’accompagnement à domicile de L’Ilot).
Extrait de la bande dessinée avec Abdel de Bruxelles « Un petit expresso sans sucre » qui retrace le parcours de Steph’, un indépendant qui n’arrive plus, malgré son travail, à s’en sortir financièrement.
Les crises successives – financière, économique, sanitaire, sociale – ont fragilisé notre société, frappant durement les travailleuses et travailleurs précaires. Notre association, active contre le sans-abrisme, en témoigne quotidiennement : des milliers de personnes font face à l’insécurité de l’emploi, à la perte de logement et à une érosion progressive de leurs droits.
Un peu partout dans le monde, l’extrême-droitisation des débats politiques a notamment pour conséquence de marginaliser les personnes les plus fragiles. En Belgique, la récente modification du paysage politique annonce des réformes qui semblent privilégier la flexibilité du travail au détriment de la sécurité. Dans un climat d’installation de nouveaux gouvernements à différents niveaux de pouvoir, il est crucial de remettre les droits des travailleurs et travailleuses précaires au centre du débat.
À L’Ilot, nous refusons de traiter uniquement les symptômes de la précarité. Nous offrons un accompagnement global, avec l’objectif que les personnes puissent retrouver une stabilité professionnelle et une autonomie durable. Collaborant au quotidien avec les autorités politiques et publiques, nous plaidons pour des réformes politiques ambitieuses, ciblant le logement abordable, l’automatisation des droits, la sécurisation de l’emploi, l’individualisation des droits sociaux ou encore l’accès aux services de santé mentale.
Notre pays, nos régions, doivent devenir des territoires de solidarité, où chaque travailleur ou travailleuse pourra retrouver dignité et espoir. C’est dans cet esprit que nous collaborons avec Abdel de Bruxelles, auteur de BD engagé, qui a à coeur de mettre en lumière les souffrances liées au travail précaire. Son oeuvre, dont vous pourrez
admirer les prémisses dans ces pages, sera bientôt disponible via tous nos canaux de communication.
Bonne lecture !
Ariane Dierickx, directrice de L’Ilot
Un loyer qui augmente, des prix qui ne cessent de s’enflammer, un marché de l’emploi qui favorise l’ère de l’ubérisation maximale (dans laquelle les personnes engagées sont forcées de passer sous le régime indépendant, sans plus aucune sécurité). Voici le dangereux mélange qui nous menace toutes et tous, qui pourrait tout nous faire perdre ! En 2024, plus de 2,1 millions de Belges courent un réel risque de pauvreté ou d’exclusion sociale [1].
Avec 1426 euros mensuels, le statut d’Emmanuel est devenu celui d’une personne vivant sous le seuil de pauvreté [2]. Loin d’être un cas isolé, de plus en plus de travailleuses et travailleurs arrivent chaque jour dans nos services n’ayant plus les moyens de se loger. Ces femmes et ces hommes, souvent invisibles aux yeux de la société, luttent quotidiennement pour joindre les deux bouts. Leur courage et leur ambition demeurent puissants et se voient parfois engloutis bien rapidement par une dynamique mortifère : une faillite, une maladie, une accumulation de factures, etc. Et la hausse des prix qui s’amuse sans vergogne à jouer avec ces vies.
Le travail ne protège plus de la pauvreté. Vos dons sont nécessaires et permettent à nos services d’accueil d’assurer un lieu de réconfort, un toit pour plusieurs mois, mais aussi un espace de travail et de rencontre pour que ces travailleuses et travailleurs sans abri puissent se reconstruire, retrouver l’estime de soi et restaurer leurs droits. Grâce à vous, l’Ilot propose un accompagnement au long cours pour permettre à chacun et chacune d’aller de l’avant, de retrouver confiance et d’envisager à nouveau une trajectoire de vie épanouissante.
La réalité est criante : l’indexation des salaires ne permet plus de compenser l’augmentation des prix et certains barèmes salariaux ne rencontrent plus le coût de la vie. Davantage de travailleurs et travailleuses basculent dans le champ de l’urgence sociale, de l’aide alimentaire ou encore de l’aide énergétique. La précarité des travailleurs et des travailleuses est un fléau silencieux.
Votre soutien est essentiel pour nous permettre de poursuivre efficacement nos missions d’accompagnement.
*Prénom d’emprunt. Nos témoignages sont reconstitués d’après plusieurs expériences de terrain pour ne pas mettre en péril l’anonymat de nos usagers et usagères.
[1] https://statbel.fgov.be/fr/themes/menages/pauvrete-et-conditions-de-vie/risque-de-pauvrete-ou-dexclusion-sociale#news
[2] En Belgique, le seuil de pauvreté s’élève à 1.450 € par mois pour une personne seule et à 3.045 € pour un ménage de deux adultes avec deux enfants.
Photo : ©Towfiqu Barbhuiya
Ce vendredi 27 septembre, vous étiez plus de 200 à la Tricoterie pour fêter les un an de Circé de L’Ilot, le premier Centre de jour pour et par les fxmmes sans abri à Bruxelles.
Merci à Florence Mendez pour l’animation de la soirée et aux autres guests de renom Kaoutar Berne, Clémence Daubelcour, Dicklan, France Van Bellingen, Letizia Finizio, Marine Sergent, Tatou et Daphné pour leurs spectacles incroyables ! Et surtout merci à vous pour votre présence et votre soutien qui nous aide à faire chaque jour un pas de plus vers la reconnaissance du sans-abrisme au féminin.
On remet ça ensemble ? N’hésitez pas à venir à notre soirée thématique du 7 octobre pour en finir avec le sans-abrisme ou celle du 13 novembre avec La Ligue d’Improvisation Belge Professionnelle et l’humoriste Zidani.
L’asbl L’Ilot vous convie à une soirée originale pour venir soutenir en rigolant la lutte contre le sans-abrisme
Une soirée riche en surprises où la bouillonnante Zidani mêlera ses innombrables talents à ceux de la Ligue d’Improvisation Belge Professionnelle (LIB). Un savoureux mélange qui ne laissera personne indifférent∙e !
Au lendemain de la Coupe du Monde d’Improvisation Professionnelle (du 20 au 27 octobre) organisée par la LIB, celle-ci enverra au front quatre de ses meilleur∙es représentant∙es pour nous faire passer une soirée inoubliable.
Quand ? Le mercredi 13 novembre de 19h à 22h
Où ? À La Tricoterie
Prix ? Prix standard : 30 euros / Prix de soutien : 100 euros
19h – 20h : accueil, bar & petite restauration
20h – 22h : Zidani & La Ligue d’Improvisation Belge Professionnelle se plient en 4 !
22h-24h : Poursuite des festivités autour du bar !
Réservation obligatoire via info@ilot.be
Une des compétences importantes des communes est l’aménagement de l’espace public. Il est bien connu que celui-ci a trop souvent été conçu, par le passé et encore actuellement – par des acteurs publics ou privés -, pour dissuader les personnes sans chez-soi de s’y installer : bancs fractionnés pour empêcher de s’y allonger, protubérances empêchant de s’asseoir sur les devantures, ou encore disparition totale de mobilier urbain lors de la rénovation de certains endroits pour « éliminer » le problème. Cette évolution impacte aussi l’ensemble de la population qui se déplace dans l’espace public. Selon nous, un autre type d’espace public, plus inclusif, est possible : accueillant, sécurisé et offrant des services universels à toutes et tous, que les personnes disposent ou non d’un chez-soi.
Voici une série de recommandations non-exhaustive :
Nous vivons à une époque où le manque d’espaces communs devient un enjeu sociétal majeur : de plus en plus de personnes sont isolées au quotidien et nos modes de vie – personnels comme professionnels – tendent à diminuer les opportunités de rencontre. Miser sur un espace public accueillant et convivial constitue une réponse à ces enjeux. Les récentes rénovations du piétonnier du centre-ville bruxellois, avec notamment l’installation de « chaises à bascule », ont suscité un réel enthousiasme parmi les passants et passantes. C’est un exemple positif dont d’autres communes pourraient s’inspirer. De manière plus classique, nous pensons que les bancs publics doivent non seulement continuer d’exister, mais être plus nombreux.
En complément, il est temps d’interdire les « dispositifs anti-SDF », indignes d’une société qui se veut démocratique, tournée vers l’autre et solidaire.
Un réseau de toilettes publiques
Comparée à d’autres pays, la Belgique souffre d’un manque criant de toilettes publiques. Cela pose un véritable problème sanitaire, entraînant des conséquences sur l’insalubrité de certains lieux et une réelle inégalité de genre, les femmes étant les premières victimes de cette carence. Au niveau des initiatives intéressantes à généraliser, certaines communes ont, par exemple, œuvré à faciliter l’accès aux toilettes des établissements Horeca. Mais cela reste insuffisant à nos yeux : les personnes les plus marginalisées ont encore trop souvent du mal à accéder à ces lieux. Les communes doivent développer un réseau de toilettes publiques offrant un accès universel. De nombreuses villes à travers le monde y parviennent, pourquoi pas nous ?
Des bains publics en voie de disparition : un patrimoine à sauvegarder
Durant le 20e siècle, les communes belges ont progressivement fermé le dense réseau de bains publics dont elles avaient la responsabilité. Alors que posséder une salle de bain individuelle était un luxe exceptionnel, c’est désormais devenu la norme. Pourtant, sans même parler des personnes vivant dans la rue, une part conséquente de la population n’a toujours pas de salle de bain dans son logement. Ces fermetures ont entraîné la création de structures associatives pour pallier ce manque (L’Ilot gère deux centres de jour notamment destinés à cet effet mais d’autres structures ont été créées autour de ce besoin spécifique comme DoucheFLUX ou Rolling Douche à Bruxelles). Cependant, ces lieux ne sont pas aussi « universels » qu’un service public et peuvent être perçus comme stigmatisants, en plus d’être insuffisants pour répondre à la demande. Certaines communes ont maintenu des douches sociales au sein des piscines communales, ce qui est une bonne initiative à renforcer afin que l’hygiène personnelle ne soit plus un luxe inaccessible. Ces dispositifs pourraient s’accompagner de services de consignes, outil indispensable pour beaucoup de personnes sans chez-soi.
Nos villes seront de plus en plus confrontées à des épisodes de chaleurs intenses. Pourtant, paradoxalement, nous manquons cruellement d’accès à l’eau potable dans l’espace public. En comparaison avec Paris et d’autres villes françaises, la différence est frappante. Bruxelles a commencé à augmenter le nombre de fontaines d’eau potable ; une excellente initiative, mais insuffisante. Les communes peuvent faire davantage, et c’est aussi le cas dans les communes wallonnes, comme à Charleroi, où le manque est criant.
Le réseau de fontaine Wallace à Paris : un réseau dense et ancien
Certaines personnes assimilent les habitants et habitantes de la rue à la saleté. Pourtant, il est évident qu’une personne vivant dans la rue génère moins de déchets annuels que la majorité de la population. Ces personnes sont aussi les premières victimes d’un environnement dégradé et sale auquel elles ne peuvent se soustraire. Il est donc important de repenser les enjeux de propreté publique en les intégrant à cette réalité : il faut notamment plus de poubelles, un ramassage plus fréquent, ainsi que plus de cendriers pour limiter la multiplication des mégots.
Il semble que, sous couvert d’actions visant à « sécuriser » l’espace public, certaines communes et certain·es bourgmestres cherchent à durcir leur discours vis-à-vis des personnes sans chez-soi : appels à ne pas donner d’argent, opérations de « nettoyage », règlements anti-mendicité, etc. Outre que ces méthodes ne règlent en rien le problème (qui ne fait que se déplacer d’un quartier à un autre, avec souvent en parallèle une dégradation de la situation des personnes qui perdent leurs repères et le lien avec les équipes sociales de rue qui les accompagnent), cette tendance est extrêmement préoccupante. Nous vivons dans des sociétés d’abondance : jamais, dans l’histoire de l’humanité, les niveaux de confort et de richesse n’ont été aussi élevés. Dans ce contexte, cette « chasse aux pauvres » est indécente. Plus que n’importe quel autre niveau de pouvoir, les communes doivent être un soutien pour les personnes les plus précarisées, pas un obstacle. Nous appelons à la fin des règlements communaux anti-mendicité et des autres dispositifs réglementaires visant à exclure les personnes de l’espace public. Nous saluons les politiques de certaines communes qui repensent leurs services de police et de gardiens et gardiennes de la paix pour plus de proximité : soutenir et orienter les personnes vivant dans la rue plutôt que les chasser et les réprimer. Le service public en sort grandi.
Le CPAS est le principal outil dont disposent les communes pour lutter contre la pauvreté. Malheureusement, trop d’entre eux oublient ou refusent encore d’accompagner les personnes sans chez-soi. La situation peut varier considérablement d’une commune à l’autre, preuve qu’une majorité communale peut influencer les pratiques en la matière.
Voici quelques exemples de bonnes pratiques à promouvoir :
Tout cela n’est possible que si les CPAS disposent des moyens nécessaires pour répondre efficacement à ces ambitions. Trop souvent, ces services souffrent d’un manque de personnel, ce qui complique l’exécution de leurs missions et contribue à la difficulté du travail des agents et agentes de CPAS.
Comme abordé dans l’axe 1, la question du genre est souvent présente dans les problématiques liées au sans-chez-soirisme, mais elle est trop souvent négligée dans les politiques communales. Les études montrent que la première cause de perte de logement pour les femmes est la violence : psychologique, intrafamiliale, conjugale, sexuelle, économique ou parfois toutes à la fois.
Les communes doivent traiter cette problématique sur deux fronts : anticiper ces violences et en gérer les conséquences lorsque la prévention a échoué. Voici quelques propositions dans ce domaine :
Au-delà de la question des violences faites aux femmes et aux personnes sexisées, les communes doivent intégrer la dimension de genre dans toutes leurs décisions. C’est particulièrement vrai pour le sans-chez-soirisme : aujourd’hui, les politiques sont encore largement pensées pour un profil masculin « type ». Pourtant, il est essentiel de prendre en compte la diversité des parcours, à commencer par les spécificités du sans-chez-soirisme féminin.
On peut parler de l’espace public et de sa gestion mais, ultimement, sortir du sans-chez-soirisme passe par l’accès à un logement. Les communes ont un rôle clé à jouer en la matière.
Nos sociétés sont confrontées à un paradoxe : d’un côté, des logements vides, inoccupés ; de l’autre, des personnes dormant dans la rue faute de logement. Lutter contre les logements inoccupés permet d’augmenter le nombre d’habitations disponibles, ce qui a un impact positif dans la lutte contre le sans-chez-soirisme. De nombreuses communes ont mis en place des taxes, parfois sévères, sur les bâtiments vides, mais cela ne suffit pas : encore faut-il les identifier. Certaines ont également développé des programmes de rénovation de bâtiments abandonnés, pour ensuite leur donner une vocation sociale. Ce type d’initiative est à encourager.
Presque toutes les communes disposent d’un parc de logements leur appartenant, mais la gestion de celui-ci varie grandement d’une commune à l’autre. Pour certaines, c’est une source de revenus ; pour d’autres, un levier d’action sociale. Si chaque commune dédiait une partie de son parc au relogement de personnes sans chez-soi, cela aurait un impact significatif sur notre secteur, qui peine de plus en plus à trouver des logements disponibles.
Un des importants leviers des communes sur le marché du logement se trouve dans les procédures d’urbanisme. Lorsque des projets immobiliers d’envergure leur sont soumis, les communes devraient systématiquement exiger qu’une part de ceux-ci soit dédiée au logement social. Ne pas le faire contribue à l’augmentation du nombre de logements neufs et chers, au détriment des logements abordables. Garantir une portion de logements sociaux, c’est assurer que des lieux accessibles restent disponibles pour les personnes en grande précarité, afin que personne ne soit oublié.
Vidéo avec Benjamin Peltier, chargé de plaidoyer à L’Ilot.
Être un ou une « enfant bagage », qui l’a un jour envisagé ? C’est pourtant la réalité d’Anaïs, 6 ans, qui suit sa maman dans une vie de rue. En Belgique, près de 20 % des personnes sans chez-soi sont des enfants, témoins de violences familiales et de difficultés de leurs parents sans pouvoir trouver refuge auprès d’eux, qui ne sont plus en capacité d’assurer un cadre sécurisé.
Depuis 1987, L’Ilot, via sa Maison d’accueil pour femmes et familles « le 160 », accueille des enfants en perte d’identité, des petits garçons et des petites filles envahies de stress, d’anxiété, d’insécurité… Depuis 2012, L’Ilot propose un projet pédagogique spécifique pour qu’ils et elles retrouvent leur place dans la famille, leurs repères, leurs liens sociaux ou encore leurs émotions…
« 40 % des enfants à Bruxelles vivent dans la pauvreté. Nos travailleurs et travailleuses sociales n’ont qu’une mission : permettre à ces petits et petites de retrouver tout simplement une place d’enfant et éviter qu’ils ne grandissent trop vite. » explique Jean-Luc Joiret, directeur de la Maison d’accueil.
Notre objectif : libérer la parole des enfants pour les aider à sortir de cette boucle du déterminisme social. Leur permettre de grandir à leur rythme, en respectant leurs besoins et leurs envies et en faisant vivre leurs droits.
Ensemble, nous pouvons les entourer d’insouciance et de bonheur. Sans votre aide, sans notre travail d’équipe, bien trop d’enfants continueront à subir la pauvreté et l’exclusion au quotidien.
Nos projets sont indispensables et ne peuvent se concrétiser que grâce à vous : améliorer l’aménagement de nos espaces d’accueil pour permettre aux enfants et à leurs parents de retrouver une bulle d’intimité, y développer de précieux moments d’échanges liés à la parentalité, acheter le matériel nécessaire à la scolarité des enfants, leur proposer des activités sportives et des loisirs, etc. Ensemble, assurons un avenir meilleur à ces enfants qui fréquentent ou fréquenteront un jour les services de L’Ilot.
Une salle, deux spectacles, le tout dans une ambiance décontractée pour défricher le sans-abrisme. Mieux le comprendre pour pouvoir le combattre, c’est la proposition faite par l’asbl L’Ilot.
Un concours télévisé opposant entre eux des sans abri aux talents artistiques. Son objectif : les pousser à bout.
Svetlana et Hypolithe sont les deux finalistes et vont s’affronter dans un duel pour des lots bien dérisoires : un endroit où faire la manche, une tente, un réchaud et une magnifique corbeille en osier. À coup de bolas et de Claude François, les deux candidats s’engagent alors dans une compétition forcenée, menée par la voix d’un présentateur invisible.
Comment sauve-t-on sa peau dans un « jeu » – ou peut-être tout simplement dans une société – régi par la rivalité et le besoin d’écraser l’autre ? On fuit ou on se bat ? Contre ou avec l’autre ?
Le coût d’un toit sécurisant, d’un chez-soi, augmente d’année en année. Le loyer devient ce monstre qui engloutit souvent la moitié du revenu. Une vie en location. Des êtres humains sans abri, sans un toit, sans un chez-soi ! Comment est-ce possible ? À qui profite cette injustice ? Y aurait-il une loi invisible ? La conférence spectaculée Dream House® est le résultat de l’enquête menée par Brigitte Grisar et Jacques Esnault.
La possible fin du sans-abrisme passe par un changement de paradigme et des mentalités de tout un chacun et chacune. C’est, en cela, l’affaire de toutes et tous, et non des seuls « expert·es » de la question. Et c’est pour ça que l’asbl L’Ilot vous convie à venir assister à cette conférence pas comme les autres ce lundi 7 octobre.
Réservation obligatoire via info@ilot.be