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Aurélie Van De Walle

Kart #6 | « Notre volonté, c’est de créer du lien, de mettre des mots sur ce qui est tabou. Sur ce qui est caché. » 1024 576 L'Ilot

Kart #6 | « Notre volonté, c’est de créer du lien, de mettre des mots sur ce qui est tabou. Sur ce qui est caché. »

Quelle place prend le sans-abrisme caché dans ton travail au quotidien ?

C’est quelque chose qui est extrêmement présent. Il est à associer à la culpabilité, à la honte que chaque usagère peut porter en elle. C’est la conséquence directe du manque de soutien, d’aide et d’écoute auquel ces femmes ont été confrontées tout au long de leur trajectoire. C’est là que le sentiment de culpabilité naît.

Le discours ambiant auquel ces femmes sont souvent confrontées consiste à considérer comme normal le fait d’avoir subi les violences qui souvent vont mener par la suite au basculement vers la rue. Elles peuvent être physiques, sexuelles, psychologiques ou économiques, mais elles sont toujours le point de départ d’un parcours d’errance.

Un parcours qui mènera ensuite à une situation de très grande précarité, puis de sans-abrisme qu’elles ne voudront pas assumer par peur du jugement. C’est une des formes du sans-abrisme caché. Et c’est d’abord un cercle vicieux qui n’aide ni à leur reconstruction ni à leur rétablissement.

Comment établir un lien de confiance avec des personnes qui en sont réduites à devoir s’invisibiliser à ce point pour cacher leur situation ?

L’idée n’est jamais de convaincre. Et de potentiellement amener une violence supplémentaire. Notre volonté, c’est de créer du lien, du relationnel. De mettre des mots sur ce que l’on tait habituellement dans leur sphère privée. Sur ce qui est tabou. Sur le silence. Sur ce qui est caché. Sur ce qu’on voudrait ne pas voir, mais qui existe. Je dirais qu’il n’y a pas une seule manière de fonctionner. On s’adapte avant tout à la personne qui se trouve en face de nous, au récit qu’elle nous renvoie, mais la base doit toujours être l’écoute.

Est-ce qu’une partie de votre travail, ce n’est pas aussi de parvenir à faire accepter la situation aux premières concernées ?

On observe en tout cas qu’à leur arrivée chez nous, beaucoup de mamans ne veulent pas voir L’Ilot comme une Maison d’accueil pour personnes sans abri. Elles préfèrent dire que c’est un centre de vacances. Un endroit où leurs enfants vont se sentir bien, où ils vont pouvoir s’amuser. Très vite, c’est à nous d’expliquer que non, nous ne sommes pas un centre de vacances. Là encore, il s’agit de mettre des mots sur une réalité. Parce qu’accepter cette réalité, c’est une étape essentielle pour pouvoir se reconstruire. Bien sûr, on s’adapte à l’âge de chaque enfant, mais c’est notre métier aussi d’expliquer que maman rencontre certaines difficultés pour le moment et qu’ils ont ici un espace pour se sentir en sécurité et trouver l’aide dont ils ont besoin. Et pour tenter de retrouver un chez-soi le plus rapidement possible.

Statistiquement, les femmes représenteraient à peine plus de 20% des personnes sans abri. Or, on sait que ces chiffres officiels sont trompeurs. Comment expliquer que les femmes soient si peu visibles en rue ?

Parce que les femmes savent qu’elles ne sont en sécurité nulle part. Elles ne sont même pas en sécurité chez elles, où elles vivent des violences conjugales. Et encore moins en rue, qu’elles évitent à tout prix parce qu’elles savent que l’espace public, surtout la nuit, est synonyme de risque d’agressions. Du coup, lorsqu’elles se retrouvent sans logement, parce qu’elles ont quitté un conjoint violent ou parce que, mamans solos, elles ne s’en sortent plus à payer toutes seules les factures, elles déploient toute une série de stratégies d’évitement de la rue : dormir sur le canapé d’une copine, s’installer provisoirement dans une voiture, etc. Lorsqu’elles sont en rue, elles font tout pour ne pas être repérées et pour éviter les agressions : marcher toute la nuit, se masculiniser, etc. Surtout, ne pas avoir l’air d’errer. Toutes ces situations de sans-abrisme caché échappent aux dénombrements, ce qui fait dire aux statistiques que les femmes sont moins nombreuses que les hommes à vivre l’errance. Alors qu’on voit bien qu’elles sont clairement dans des situations de très grande précarité.

Le fait est que pour qu’une femme arrive chez nous, il y a un chemin énorme. Aussi parce qu’il y a une peur réelle de franchir le cap. Et qu’avant d’arriver chez nous, elles ont déjà passé un long moment à vivre cachées, dans un grand isolement.

L'interview d'Axelle Lemaire, travailleuse sociale et assistante psychologue de la Maison d'accueil pour femmes et familles de L’Ilot.

Interview d'Alexandra, coordinatrice de la Maison d'accueil pour hommes de L'Ilot.

Kart #6 | Le sans-abrisme caché 1024 576 L'Ilot

Kart #6 | Le sans-abrisme caché

Pendant longtemps, il était plus facile de ne pas y penser. Ou de se contenter de tenir pour acquis ce que voyaient nos yeux. « Sans abri », c’était d’abord désigner un homme. Barbu de préférence. Aux vêtements sales et aux chaussures trouées. Au visage marqué par la vie. Des signes distinctifs, comme autant de barrières. Celles-là ne nous empêchaient pas de partager leur détresse, mais installaient par la force des choses une distance. Un fossé entre la situation de cet homme seul assis sur un carton et de la jeune femme qui l’observe. Une femme qui se pensait préservée. Oui, mais de quoi ? Et par quel miracle ? Pourquoi le sans-abrisme connaitrait-il une frontière genrée ?

La question n’a plus lieu d’être. En 2023, le sans-abrisme caché est, on le sait, d’abord et aussi du sans-abrisme au féminin. Une réalité invisible avant, mais que nos dernières initiatives en la matière, comme notre recherche-action sur la violence vécue par les femmes sans abri, ont eu le mérite de rendre concrète. Conséquence de quoi, en juin prochain, L’Ilot ouvrira aussi le premier Centre de jour pour femmes sans abri en Belgique. L’aboutissement d’une prise de conscience, mais le début encore d’un nouveau combat à mener. Parce que le sans-abrisme est une hydre à mille têtes. Dont la diversité des visages raconte le combat d’une société qui tourne à l’envers.

Et qui ferait croire aux concernées que ce sont elles les premières responsables de leur situation. Le drame d’une époque incapable d’accompagner celles qui souffrent, mais d’une société devenue référence quand il s’agit de les pointer du doigt. Elles, ce sont ces femmes dont le parcours de rue raconte d’abord une trajectoire de violences multiples : sociale, économique, physiques, psychologiques, sexuelles…

Ces femmes qui, avant d’arriver en rue, venaient déjà peupler les rangs de ce sans-abrisme qui ne dit pas son nom. Invisibles, mais tellement présentes. Coincées chez un conjoint violent, hébergées un temps chez une amie compatissante, pressées par un propriétaire intransigeant ou condamnées à vivre dans une voiture, paniquées à l’idée de faire subir à leurs enfants la violence de la rue... Enfermées, mais à l’intérieur de ce cercle vicieux, ce carcan qui a longtemps rendu inobservable ce sans-abrisme pourtant de masse.

Un comble quand on se sent si seule. Isolée et presque coupable de l’être. De ne pas être entendue, comprise ou écoutée. À défaut de pouvoir toujours réellement chiffrer ce sans-abrisme-là, il y a maintenant des mots. Les témoignages de celles qui chaque jour fréquentent nos services. Et permettent la prise de conscience de chacun et chacune d’entre nous. Une nécessité pour continuer d’avancer ensemble. Sans plus jamais fermer les yeux.

Merci pour le temps que vous prendrez à lire cette réalité, et pour le soutien que vous nous accorderez !

Ariane Dierickx, directrice générale de L’Ilot

8 mars : L’Ilot se mobilise pour faire entendre les droits des femmes ! 1024 576 L'Ilot

8 mars : L’Ilot se mobilise pour faire entendre les droits des femmes !

L’Ilot agit sur le terrain pour le respect des droits des femmes qui fréquentent ses services et de ses travailleuses.

Cette Journée internationale des droits des femmes, c’est l’occasion de rappeler que les femmes sans abri et mal logées mais aussi les travailleuses sociales de notre secteur sont TOUS LES JOURS confrontées, chacune à leur niveau, au sexisme, à la misogynie, à la violence...

  • TOUTES les femmes sans abri ont connu une ou plusieurs formes de violence liée à leur identité de femme. Le viol aussi, pour la grande majorité d’entre elles.
  • TOUTES les travailleuses de L’Ilot ont un jour été confrontées au minimum à des paroles sexistes ou des gestes déplacés.
  • TOUTES les femmes, sans exception, sont quotidiennement exposées au non-respect de leurs droits et aux inégalités par rapport aux hommes.

Ce 8 mars, L’Ilot se mobilise pour faire entendre les droits des femmes :

  • « Tattoos pour toutes » : la Casa Mariposa est un studio de tatouage écoresponsable bruxellois. Ce 31/03, il offre un tatouage gratuit à chaque résidente de notre maison d’accueil pour femmes qui le souhaite ! Les tatoueuses se proposent d’effacer une cicatrice du passé, d’illustrer un nouveau départ, de les aider à retrouver une certaine estime d’elles-mêmes…
  • Grève, réflexion et lutte dans nos services : le temps d’une après-midi, les résidentes, usagères et travailleuses de L’Ilot qui le peuvent sont invitées à laisser de côté leurs obligations pour se retrouver afin de partager un repas, d’échanger sur les initiatives féministes menées à L’Ilot (par exemple, dernièrement, la diffusion d’un questionnaire sur les violences sexistes au travail) et de préparer des banderoles et calicots pour le grand rassemblement et la marche qui se tiendront en fin de journée !
  • Manifestation nationale : les collègues, usagers et usagères sympathisants et sympathisantes qui le désirent rejoignent les participantes de l’après-midi de grève pour se rendre dans le centre de Bruxelles et participer à la manifestation nationale pour les droits des femmes, en compagnie d’autres partenaires du secteur. Le rendez-vous : 08/03 à 17h à la Gare Centrale !

Les droits des femmes sans abri et mal-logées sont plus que systématiquement bafoués, niés, minimisés… C’est notamment pour leur garantir accueil, écoute et soutien prenant en compte les spécificités liées à leur identité de femmes que L’Ilot ouvrira ce 8 juin son nouveau centre de jour réservé aux femmes et pensé avec et pour elles. Une première en Belgique qui va, nous l’espérons, encourager d’autres initiatives focalisées sur le public féminin dans le secteur de l’aide aux personnes les plus précarisées.

Crise de l’accueil : L’Ilot participe au rassemblement de ce vendredi 24/02 1024 576 L'Ilot

Crise de l’accueil : L’Ilot participe au rassemblement de ce vendredi 24/02

Des centaines de personnes en demande d’asile dorment dans la rue en plein hiver, au mépris des lois belges et du droit international. Ils ont fui leur pays, à cause des guerres, des conflits politiques, de la pauvreté, de l'exploitation économique.
Cela fait plus d’un an que l’État belge se soustrait à ses obligations en matière d’accueil et de droits humains. Depuis ce mercredi 15 février, suite à l’expulsion des résident.e.s ou occupant.e.s du squat « Palais des droits » à Schaerbeek et malgré les promesses de relogement, entre 200 et 250 personnes passent la nuit dans un campement de fortune sur les trottoirs le long du canal. De nombreuses autres se sont dispersées dans les rues, invisibles. C’est uniquement grâce à la solidarité citoyenne, et à l’organisation et l'unité des exilés eux-mêmes, que le drame humanitaire a pu être évité jusqu’à présent.
Cette situation est l'incarnation des politiques migratoires qui à tous les niveaux bafouent la dignité et les droits des personnes. Il est temps de changer de dynamique. Des solutions existent. C’est une question de choix politiques. Il est temps d'affirmer publiquement notre solidarité et de rappeler l’État à ses obligations.
Ce vendredi à 17h, des demandeurs d'asile et personnes solidaires appellent à un rassemblement et une chaîne humaine autours du centre Fedasil « le petit château » :
  •  Pour une solution immédiate de cette « crise » et un hébergement pour toutes les personnes à la rue.
  • Pour une politique d’asile et d’accueil digne et humaine.
  • Pour la solidarité et le respect des droits fondamentaux de tou.te.s, indépendamment de leur origine, de leur religion, de leur orientation sexuelle ou de leur genre.
  • Contre le racisme et les discours haineux de l’extrême droite.
150 à 200 nouvelles personnes en rue : le gouvernement fédéral met le secteur sans-abris à genoux 1024 576 L'Ilot

150 à 200 nouvelles personnes en rue : le gouvernement fédéral met le secteur sans-abris à genoux

Depuis des mois maintenant le gouvernement fédéral n’honore plus son obligation légale de loger toute personne en demande d’asile arrivant en Belgique durant la durée de sa procédure. Malgré les condamnations nombreuses et répétées, notamment par la Cour européenne des Droits de l’Homme, et les menaces de saisies, le fédéral ne parvient pas ou ne veut pas mettre fin à cette crise de l’accueil.

Laissés à la rue, des centaines de demandeurs d’asile avaient trouvé ces derniers mois un toit dans un bâtiment occupé à Schaerbeek à la Rue des Palais. Pendant des mois, la situation y a été catastrophique : pas de chauffage, quasi pas de sanitaire, des situations de violence, propagation de maladies contagieuses, etc. Les autorités fédérales, régionales et communales avaient décidé de mettre fin à cette situation. Leur promesse était de reloger tous les demandeurs d’asile et de fermer « Palais ». Si la fermeture a bien eu lieu hier avec un déploiement policier à proprement démesuré, la promesse de relogement n’a pas été tenue. Ils étaient encore 150 à 200 en fin de journée, enregistrés pour le relogement mais laissés sur le carreau. La police les a alors dispersés (pour aller où  ?). C’est naturellement qu’ils se sont ensuite retrouvés devant le Petit-Château, site historique de l’accueil des demandeurs et demandeuses d’asile en Belgique. Là, les zones de police de Bruxelles ne voulant pas d’un camp de tentes sur leur territoire, les ont repoussés vers Molenbeek. De l’autre côté du canal, la police molenbeekoise caressant le même souhait les a refoulés sur le canal. C’est donc sur le pont entre les deux zones de police et sur les berges du canal que des dizaines de tentes ont été montées. Tentes apportées par des citoyens et des citoyennes pour pallier l’absence totale de moyens mis à disposition par l’Etat. Les moins chanceux, n’ont même pas eu droit à une toile au-dessus de leur tête et ont dû passer la nuit à la belle étoile.

Alors que le sans-abrisme à Bruxelles est galopant et que les associations du secteur sont débordées et mal financées, l’incompétence du gouvernement fédéral crée de fait un surplus de centaines de personnes à la rue dans Bruxelles. Proportionnellement cela signifie que plus ou moins un quart de la population actuelle dormant en rue en région bruxelloise est composé de demandeurs et demandeuses d’asile qui jusqu’à il y a un an, étaient logé·es par Fedasil.

En tant qu’organisation de lutte contre le sans-abrisme, L’Ilot voudrait signifier sa colère et son indignation devant une telle situation : le gouvernement fédéral participe à approfondir l’étendue du sans-abrisme à Bruxelles. Cela met le tissu de soutien aux personnes sans chez-soi à genoux, en le faisant crouler sous les besoins alors qu’il était déjà étranglé. Cette situation doit cesser et le gouvernement fédéral doit prendre ses responsabilités. 

Carte blanche : « Tarif social et statut BIM » 1024 576 L'Ilot

Carte blanche : « Tarif social et statut BIM »

La décision du gouvernement de ce 6 février 2023 de ne plus octroyer le tarif social "gaz et électricité" aux personnes bénéficiaires de l’intervention majorée (statut BIM) est une grave atteinte à la lutte contre la précarité énergétique. Des milliers de ménages qui, grâce à cette mesure de protection, se maintenaient de justesse au-dessus du seuil de pauvreté risquent de se voir propulsés sous celui-ci, à cause de l’augmentation soudaine de leurs factures d’énergie.

C'est pour éviter que des personnes précarisées se retrouvent à la rue que L'Ilot a co-signé une Carte Blanche écrite à l'initiative de La Coordination Gaz Elec Eau (CGEE).
Rejoignez-nous au Belgian Housing Action Day 2023 ! 1024 576 L'Ilot

Rejoignez-nous au Belgian Housing Action Day 2023 !

L’Ilot participe à l'édition 2023 du Housing Action Day qui se tiendra le 26 mars 2023. L'objectif de ce rassemblement : faire valoir le droit au logement à tous·tes en Belgique.

Le logement pour les gens, pas pour l'argent !

Rassemblons-nous ce 26 mars 2023 pour faire valoir notre droit au logement !

Habiter dans un logement décent, c'est une base nécessaire pour se construire une vie stable. Aujourd’hui en Belgique, nous sommes de plus en plus nombreux·ses à faire face à des loyers excessifs et des charges exorbitantes, des logements insalubres, des pratiques illégales et discriminantes de la part des propriétaires, une justice de paix inaccessible, une administration parfois incompréhensible. Bref, nous avons de plus en plus de difficultés à trouver un logement et avoir la sécurité de pouvoir y rester !

Cette situation n'est ni acceptable ni normale ! Cela suffit !

Nous sommes convaincu·es de pouvoir changer cette situation. Il ne s’agit pas d’un problème individuel : la crise du logement nous concerne tous·tes ! Nous appelons donc à l’organisation d’un mouvement collectif pour le droit au logement en Belgique !

Nos exigences :

  • Une baisse des loyers immédiate !
  • La fin des expulsions et la régularisation pour tous·tes !
  • PLUS de logements sociaux et d'alternatives au marché privé !

Rejoignez-nous au Belgian Housing Action Day ce 26 mars 2023 !

 

Précarité hydrique : participez à l’évènement « Bruxelles à sec » 1024 576 L'Ilot

Précarité hydrique : participez à l’évènement « Bruxelles à sec »

Cet évènement est d’abord le fruit d’une rencontre entre un podcast sorti récemment, « Corps Sales // Ville sèche », qui aborde les questions des problèmes d’accès à l’eau à Bruxelles et L'Ilot. Nous avons ainsi voulu croiser la question de l’accès à l’eau en ville avec une thématique chère à L’Ilot : le sans-abrisme au féminin.
Avoir accès à son corps, être en paix pour en prendre soin, en sécurité, c’est très compliqué quand on est une femme sans abri. L’intime, le soi et, par extension, l’hygiène sont constamment mis à mal par la rue et l’errance. À l’heure où les crises sociales rendent l'accès au logement toujours plus compliqué, à l’heure où de plus en plus de personnes se retrouvent à la rue, se laver hors /sans / mal chez soi à Bruxelles est devenu un combat.
Le sans-abrisme a, de plus, longtemps été imaginé au masculin, avec des réponses à la problématique ne prenant pas réellement en compte les spécificités liées au genre. Surtout quand on parle d’accès à l’eau : mixité quasi constante, sanitaires inadaptés, peu de sensibilisation… rendent les soins, et tous les bienfaits qu’ils procurent au corps comme à l’esprit, pas ou mal-accessibles à un public féminin sans abri ou en risque de sans-abrisme en constante augmentation.
Et pour toutes celles qui s'accrochent dans des logements insalubres, mal-chauffés ou surpeuplés, pour toutes celles qui ne se reconnaissent pas dans les lieux réservés aux personnes sans-chez-soi ou n'y ont tout simplement pas accès, les solutions se font tout aussi rares, l'état ayant pratiquement déserté ce qui nous apparait comme un service public essentiel...
Guidés dans nos réflexions par le documentaire radiophonique « Corps sales // Ville sèche » nous voulons, le temps d’une soirée d’échanges, (ré)interroger les solutions en matière d’accès à l’eau – et tout ce qui en découle – des femmes sans abri ou mal logées.
Les intervenantes :
  • Pauline Bacquaert, coréalisatrice de « Corps sales // Ville sèche »
  • Elodie Blogie, autrice de l’étude-action « Sans-abrisme au féminin : sortir de l’invisibilité » (modération)
  • Veronica Martinez, directrice et co-fondatrice de BruZelle
  • Cindy Meirsschaut, experte du vécu et pair-aidante

Rejoignez-nous ce 26/01 (de 18h à 20h) au Centre de jour de L’Ilot (Parvis de Saint-Gilles 33a, 1060 Bruxelles)

Au programme :

18h : accueil
18h10 : présentation de « Corps sales // Villes sèches » par Pauline Bacquaert
18h20 : écoute du 3e épisode de « Corps sales // Villes sèche » : « Ce qu’il faut pour sortir la tête de l’eau »
18h50 : échanges entre les intervenantes et les participant∙e∙s sur la thématique
19h35 : présentation et visite du Centre de jour

Kart #5 | L’Ilot depuis 60 ans aux côtés des ex-détenu∙e∙s 1024 576 L'Ilot

Kart #5 | L’Ilot depuis 60 ans aux côtés des ex-détenu∙e∙s

Illustration Squarefish

C’est en 1960 que l’ASBL L'Ilot est créée à l'initiative de Jean-Jacques Pagnano. À l’origine de ce projet, on retrouve avant tout une histoire personnelle, une histoire d’amitié entre deux hommes.

Jean-Jacques Pagnano voit, en cette même année 1960, l’un de ses proches amis emprisonné par suite d’un accident de voiture meurtrier commis sous l’effet de l’alcool. Jean-Jacques Pagnano découvre par l’intermédiaire de son ami les réalités de l’univers carcéral. Il constate que les compagnons de détention de son ami n’ont nulle part où aller, une fois libérés.

Touché par le sort des anciens détenus, celui qui deviendra le fondateur de L’Ilot se propose alors de les héberger pour quelques jours. Un an plus tard, en 1961, le premier centre d’hébergement ouvre ses portes à Bruxelles et propose un accueil inconditionnel et un accompagnement aux hommes sortant de prison.

D’autres Maisons d’accueil pour ex-détenus sont créées dans la foulée dans d’autres villes belges (à Marcinelle notamment en 1963, Maison d’accueil qui déménagera ensuite à Jumet) et ailleurs en Europe (France, Italie) et dans le monde (Brésil).

Aujourd’hui, L’Ilot dispose de trois Maisons d’accueil pour hommes (à Bruxelles, Jumet et Marchienne-au-Pont) et d’une Maison d'accueil pour femmes et familles (à Bruxelles). Chacune de ces quatre maisons est un lieu à taille humaine, avec une capacité d’accueil volontairement limitée afin de préserver l’intimité et le bien-être de chacun et chacune.

Parmi les différents profils hébergés dans les Maisons d’accueil, les personnes sortant de prison sont soumises à une procédure d’accueil et d’accompagnement spécifique.

Kart #5 | De la prison à la rue : d’un enfer à l’autre 1024 576 L'Ilot

Kart #5 | De la prison à la rue : d’un enfer à l’autre

Les centres d’hébergement comme les Maisons d’accueil de L’Ilot constituent le dernier rempart pour permettre au détenu d’obtenir un congé pénitentiaire et, une fois sa peine purgée, lui éviter de tomber en rue.

On le sait : le congé pénitentiaire est un moment charnière entre la vie carcérale et la libération. Ces premiers pas en dehors de la prison permettent au détenu de retrouver peu à peu sa dignité et de préparer sa sortie (recherche d’un logement, d’un emploi, etc.).

Mais voilà, les places manquent cruellement dans les structures d’hébergement comme les Maisons d’accueil de L’Ilot. À cette situation problématique se superpose une autre réalité alarmante : les institutions pénitentiaires comptent trop peu de travailleuses et travailleurs sociaux pour accompagner les détenus avant leur sortie.

Ces derniers sont toujours trop nombreux à sombrer dans la rue une fois leur liberté recouvrée, faute de réseau social sur lequel s’appuyer, de prise en charge psychosociale au sein de la prison et de places suffisantes dans les centres d’hébergement. Et c’est précisément pour ces mêmes raisons qu’ils sont privés de congé pénitentiaire durant leur incarcération.

Rien qu’au sein de la Maison d’accueil de Jumet, environ 200 demandes par an sont enregistrées pour seulement quelques places disponibles. Pour les personnes qui ne peuvent pas être hébergées, la rue est inévitable.  Avec tout ce qu’elle représente de risques de ne pas réussir son parcours de réinsertion dans la société.

En passant directement de la prison à la rue, ces hommes et ces femmes quittent un enfer pour un autre. C’est une double peine qui leur est infligée : après avoir payé leur dette à la société, ils se voient condamnés une seconde fois par l’inefficacité et les dysfonctionnements du système judiciaire et par la mentalité punitive très présente dans l’opinion publique. Stigmatisés pour le crime ou le délit qu’ils ont commis, les anciens détenus suscitent peu d’empathie auprès du public et sont ignorés dans les souffrances qu’ils vivent.

C’est en cela que l’hébergement et l’accompagnement des personnes sortant de prison constituent un sujet éminemment complexe.

Un accompagnement psychosocial individualisé et de qualité permet à des personnes que la vie n’a généralement pas épargnées de retrouver des solutions de vie dignes et durables.